Wiki Vos histoires de LGDC
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Allégeances[]

Allégeance du Clan du Tonnerre
Chef(fe) Etoile de Nuage – femelle grise au pattes argentées. (l)
Lieutenant(e) Matin Sauvage – mâle écaille. (l)
Guérisseur(se)(s) Bruine du Matin – chatte gris-bleu. (l)


Feuille Douce – chatte brune. (l)

Guerrier(ère)s Pelage de Tigre – matou au pelage semblant à celui d’un tigre. (l)


Griffe de Moineau – chatte crème mouchetée de brun aux griffes aiguisées. (l)

Patte de Feu – mâle brun aux pattes roussies. (l)

Plume de Corbeau – petit chat noir. (l)

Coeur Nocturne – chat noir au museau moucheté de blanc. (l)

Apprentie : Nuage de Nuit

Patte de Velours – mâle blanc aux larges pattes. (l)

Apprenti : Nuage de Flocon

Fleur du Printemps – chatte brune au museau et aux pattes constellés de taches blanches. (l)

Astre Blanc – femelle blanche. (l)

Chant du Moineau – mâle massif brun aux pattes longues. (l)

Apprenti : Nuage de Ronce

Belle Cerise – jolie chatte blanche au bout des pattes roussies. (l)

Pelage Blanc – chatte blanche. (l)

Plume de Merle – petit chat noir. (l)

Apprenti(e)(s) Nuage de Ronce – mâle noir. (l)


Nuage de Flocon – mâle blanc. (l)

Nuage de Nuit – femelle noire. (l)

Reine(s) Bouton d'Or – chatte jaune aux reflet dorés. (mère de Petite Noisette et Petite Feuille) (l)


Plume Légère - femelle chétive blanche. (mère de Petit Sang, Petit Doré, Petite Queue et Petit Arbre) (l)

Aile de Papillon - jolie chatte écaille brun foncé. (mère de Petit Genêt, Petit Genévrier, Petite Rose et Petit Furet) (n)

Bruyère Fleurie - femelle crème aux oreilles brunes. (mère de Petit Lilas, Petit Hivernal, Petite Matinale et Petit Geai) (l)

Chaton(ne)(s) Petite Noisette – femelle jaune aux reflet dorés. (l)


Petite Feuille – femelle brune tigrée. (l)

Petit Hivernal – mâle crème et écaille. (l)

Petit Lilas – femelle crème aux pattes brunies. (l)

Petite Matinale – femelle écaille. (o)

Petit Geai – mâle blanc immaculé. (l)

Petit Genêt – mâle écaille aux yeux verts. (l)

Petit Genévrier – minuscule femelle au poil court et brun-roux. (c)

Petit Furet – mâle brun aux épaules larges. (c)

Petite Rose – petite femelle écaille et blanche. (c)

Petit Doré – petit mâle au poil roux lustré. (c)

Petit Sang – mâle noir aux reflets rougeâtres. (c)

Petit Arbre – petit mâle blanc et noir. (l)

Petite Queue – femelle blanche à la queue courte. (c)

Ancien(ne)(s) Oreille Pointue – vieux chat brun. (c)


Patte Vive – vieux chat blanc. (c)


Allégeance du Clan du Vent
Chef(fe) Étoile d'Or – vieux mâle jaune aux reflets dorés. (c)
Lieutenant(e) Ciel Givré – femelle blanche mouchetée de gris et au museau couleur des cendres. (c)
Guérisseur(se)(s) Printemps Gelé – chatte brune aux patte blanches. (l)


Truffe Cendrée –femelle grise au museau couleur des cendres. (n)

Guerrier(ère)s Lune de l'Aube – chatte noire. (n)


Jolie Feuille – jolie chatte écaille brun. (l)

Colombe Nocturne – femelle noire au pelage soyeux. (n)

Truffe d'Ecureuil – chatte rousse au museau fin. (l)

Poil de Miel – matou brun-jaune. (n)

Patte de Renard – matou blanc aux pattes roussies. (n)

Coeur de Pierre – mâle gris. (d)

Pelage Fauve – vieux mâle au poil brun-roux. (l)

Croc de Loir – mâle gris aux canines aiguisées. (n)

Jolie Plume – chatte brune aux reflet roux. (n)

Oreille de Belette – jeune mâle crème aux petites oreilles. (n)

Pelage de Hibou – petit chat brun au pelage ébouriffé. (n)

Patte de Lapin – mâle gris-blanc. (l)

Pelage Feuillu – mâle gris au pelage épais. (l)

Petite Touffe – mâle brun au pelage hirsute. (n)

Apprenti(e)(s) Aucun apprenti
Reine(s) Pelage de Pie – femelle noire tachetée de blanc. (Porte les chatons de Cœur de Pierre) (n)
Chaton(ne)(s) Aucun chaton
Ancien(ne)(s) Museau Fendu – matou brun au museau balafré. (n)


Allégeance du Clan de la Rivière
Chef(fe) Étoile de Roseau – matou brun rosé légèrement tigré. (l)
Lieutenant(e) Écume Gelée – femelle blanche. (l)
Guérisseur(se)(s) Lune Rousse – chatte rousse. (l)


Pelage de Pluie – petite chatte noire aux pelage moucheté de fines taches blanches. (l)

Guerrier(ère)s Reflet Gris – femelle noire aux reflets grisés. (n)


Apprentie : Nuage Fiévreux

Patte Blanche – matou noir aux pattes blanches. (n)

Lune Pluvieuse – femelle blanche. (l)

Tempête d'Orage – mâle gris-bleu aux yeux d’un bleu remarquable. (n)

Ombre d'Argent – femelle blanche aux reflet grisés. (n)

Plume Blanche – femelle blanche. (l)

Plume de Givre – petit chat blanc au pelage doux et duveteux. (l)

Aprentie : Nuage du Guépard

Coeur de Ciel – femelle blanche aux yeux d’un bleu remarquable. (n)

Feuille de Lys – chatte brune. (n)

Coeur d'Orage – mâle gris aux pattes argentées. (n)

Fleur de Lune – chatte blanche aux oreilles grisées. (n)

Coeur Noir – matou noir. (n)

Patte Sanglante – chat blanc aux pattes roussies. (n)

Sens Vif – chat blanc aux fines et longues pattes roussies. (l)

Apprenti : Nuage de Souffle

Griffe de la Nuit – femelle noire aux longues griffes acérées. (n)

Apprenti(e)(s) Nuage Fiévreux – femelle brune. (d)


Nuage de Souffle – mâle blanc. (n)

Nuage du Guépard – femelle brune tachetée de noir. (n)

Reine(s) Bourgeon d'Hiver – chatte blanche. (n)
Chaton(ne)(s) Petite de Glace – petite femelle blanche. (l)


Petit Néant – petit mâle noir. (n)

Ancien(ne)(s) Écaille Vive – vieille chatte blanche au museau gris. (n)


Fol Oeil – vieux matou brun grisonnant, aux yeux sombres et à l’œil droit s’agitant dans tous les sens. (n)


Allégeance du Clan de l'Ombre
Chef(fe) Étoile de Faucon – vieux mâle brun aux pattes fines et au regard perçant. (l)
Lieutenant(e) Pelage de Givre – femelle blanche à la fourrure lustrée. (n)
Guérisseur(se)(s) Griffe Noire – grand matou blanc aux pattes noires. (n)
Guerrier(ère)s Ciel Gris – petit matou gris moucheté de blanc. (l)


Griffe d'Aubépine – chatte brune aux griffes aiguisées. (n)

Fleur du Marais – femelle grise aux pattes brunes. (n)

Apprenti : Nuage Pommelé

Longues Moustaches – jeune chat crème aux moustaches très longues. (n)

Épine de Pin – matou bun. (n)

Apprenti : Nuage de Pigeon

Châtaigne Morte – femelle brune imposante. (n)

Apprenti : Nuage d'Epine

Coeur de Rat – petit mâle gris aux poils courts. (n)

Petite Patte – petit guerrier noir aux longues et fines pattes. (n)

Apprentie : Nuage de Queue

Ombre de Feu – femelle noire aux reflet rouges. (l)

Patte Blanche – femelle noire aux épaisses pattes blanches. (n)

Apprentie : Nuage Clair

Coeur Noir – petit mâle noir. (n)

Apprenti : Nuage du Crépuscule

Brume Obscure – femelle noire. (n)

Épine Bleue – mâle gris-bleu. (n)

Apprentie : Nuage de Foudre

Apprenti(e)(s) Nuage de Queue – femelle noire à la queue courte. (n)


Nuage d'Epine – mâle noir. (n)

Nuage de Foudre – femelle noire aux yeux jaunes. (n)

Nuage Clair – femelle blanche et crème. (n)

Nuage Pommelé – petit chat gris pommelé. (n)

Nuage du Crépuscule – grand mâle crème aux yeux ambrés. (n)

Nuage de Pigeon – matou gris sombre au ventre blanc. (n)

Reine(s) Fleur d'Ombre – reine noire. (n)
Chaton(ne)(s) Petit Pic – femelle grise. (n)


Petit Tigre – mâle brun sombre tigré. (n)

Petit Midi – petit mâle brun clair. (n)

Ancien(ne)(s) Oreille Folle – vieux matou brun aux oreilles s’agitant incessamment. (d)


Pelage de Renard – mâle brun-roux. (n)


Notes de l'autrice[]

Plusieurs personnages seront des "personnages principaux" de l'histoire.

Si jamais il y a des fautes, je préfèrerai être mentionnée pour m'avertir avant de modifier quoi que ce soit.

Si la fanfic vous plaît... n'hésitez pas à laisser un commentaire, ça serait super sympa de votre part, et par-dessus tout, c'est encourageant !

Bonne lecture !


Prologue[]

« C’était trop dangereux, Étoile de Rosée… »

Trois chats, entourés de poussière d’argent, regardaient fixement une mare.

« Comment pouvais-je savoir ? murmura la femelle blanche, les yeux rivés sur le massacre.

- Tu as conduit les Clans à la perte, miaula un petit mâle crème, avec un soupçon de peur dans la voix. Le Mal nous prend tous, un a un, et ils en subissent les conséquence... et bientôt, nous aussi, nous serons rongés par ce mal obscur…

- Les Clans ne doivent pas disparaître. Nous devons les arrêter. »

Un grand mâle gris-bleu venait d’arriver. D’un coup de patte rapide, il brouilla la surface de l’eau. Les chats rassemblés autour de la mare tournèrent leur tête vers lui.

« Envoyons-leur un signe, proposa-t-il. Ainsi, peut-être qu’ils arrêteront.

- Ils devraient se rendre compte tous seuls, que ce n’est pas une bataille mais un massacre ! protesta un mâle roux.

- C’est vrai, murmura le mâle crème, qui avait reporté son attention sur l’eau mouvante. »

La femelle blanche se leva, tremblante.

« Je leur enverrais un signe. Tout cela est de ma faute, et je dois réparer mon erreur.

- Quel signe leur enverras-tu ? Quel signe pourrais les arrêter ? demanda le mâle roux. »

La femelle blanche inspira profondément.

« Je leur apparaîtrais.

- Mais tu vas en mourir ! s’exclama le mâle crème.

- J’en ai bien conscience, murmura la femelle blanche en baissant la queue. Or, c’est le seul moyen.

- Étoile de Rosée, tu es l’une des plus grands chefs qui ont existé, insista le mâle roux. Je ne veux pas te perdre ainsi, tu le sais…

- C’est pourtant la seule solution… adieu, nous nous retrouverons peut-être dans le Néant.

La surface de l’eau s’immobilisa. La femelle blanche regarda une dernière fois cette eau si pure, ce territoire si giboyeux, ces félins parsemés d’or et d’argent, si proche les uns des autres…

« Malgré le Mal, notre mémoire se souviendra de toi et t’accompagnera dans tes pas, miaula solennellement le mâle crème en se frottant contre la femelle.

- Ainsi, tu répareras toutes tes erreurs, ajouta le petit mâle gris-bleu.

- Et tu sauveras les Clans, murmura le mâle roux. Que ce choix soit le bon et ton sacrifice non vain. »

La femelle blanche les remercia d’un signe de tête et s’allongea dans l’eau. Peu à peu, son contour disparu puis elle s’effaça. Les chats se penchèrent sur l’eau. Avec un soupir de soulagement et de tristesse, chacun s’assit lorsque le massacre cessa. Au loin, ils avaient pu apercevoir la femelle blanche, sacrifiée, qui tonnait d’une voix puissante de cesser le massacre. Puis, après avoir adressé un regard d’adieu au ciel, sa silhouette s’était effacée, définitivement, cette fois. L'ombre du Mal bouillonnait sous les arbres, menaçante, possessive. Ses reflets rougeâtres sous son noir écumant ondulaient dangereusement, telles des tentacules souhaitant taillader toute âme résistant à leur force obscure.

« Ton honneur est sauf, Étoile de Rosée, murmura le mâle gris-bleu en fermant les yeux. »

Chapitre I[]

Matin Sauvage se leva doucement, prenant garde à ne pas réveiller Bruyère Fleurie.

Il devait partir à l’Assemblée et ne savait pas trop à quoi s’attendre.

Dehors, Étoile de Nuage appelait ceux qui assistaient à l’Assemblée. Une fois que tout le monde fut prêt, le Clan du Tonnerre partit en direction de l’île où avait lieu les Assemblées.

Lorsque le Clan du Tonnerre arriva, les trois autres Clans étaient déjà là. Les guerriers de tous les Clans se mélangeaient, partageaient vivement les nouvelles de leurs Clans. Matin Sauvage aperçut Étoile de Nuage qui se dirigeait vers le Grand Chêne. Elle bondit dans une des branches les plus basses et s’agrippa à l’écorce pour monter un peu plus haut. Lorsque Étoile de Roseau, Étoile de Faucon, Étoile de Nuage et Étoile d’Or furent tous montés sur le Grand Chêne, chacun se postant sur une branche différente et que les quatre lieutenants furent installés entre les racines, l’Assemblée commença.

« Le Clan de la Rivière va bien, déclara Étoile de Roseau. La pêche est bonne et la maladie n’est toujours pas dans notre Clan. Nous avons récemment nommé deux guerriers, Plume de Givre et Griffe de la Nuit. »

Le chef inclina la tête et des acclamations retentirent dans la clairière.

« Pelage de Givre ! Griffe de la Nuit ! Nuage Nocturne ! Nuage de Brise ! »

Lorsque les acclamations se turent, Étoile d'Or prit la suite. Le matou avait les côtes saillantes, son poil fauve et désordonné avait perdu de tout son éclat. Une lueur brillait faiblement dans ses yeux, la lueur du doute.

« Le Clan du Vent va bien. La chasse est bonne. Pelage de Pie, qui attends une portée, a rejoint la pouponnière, continua Étoile d’Or. »

- Le Clan de l’Ombre va bien, enchaîna Étoile de Faucon. Nous avons nommé deux nouveaux guerriers, Nuage Brisé est devenu Cœur Brisé et Nuage de Tempête se nomme maintenant Feuille de Tempête.

- Le Clan du Tonnerre va bien. Huit nouveaux chatons sont nés, la pouponnière est pleine à craquer. Ils se nomment Petit Arbre, Petit Doré, Petite Queue et Petit Sang, Petit Genévrier, Petit Genêt, Petit Furet et Petite Rose. Si personne d’autre n’a quelque chose à rajouter, je déclare l’Assemblée close, miaula Étoile de Nuage. »

Les quatre chefs sautèrent du Grand Chêne. Les discussions reprirent et, peu à peu, la clairière fut inondée d’un bruit assourdissant.

« Clan du Tonnerre ! feula Étoile de Nuage pour couvrir le brouhaha présent dans la clairière. »

Les chats du Tonnerre se rassemblèrent pour former un amas devant l’arbre-pont. Matin Sauvage s’approcha du tronc et bondit dessus. Peu rassuré, il frissonna en regardant les eaux noires qui tourbillonnaient en dessous de lui. Je ne dois pas tomber, songea-t-il. Le mâle écaille soupira de soulagement lorsqu’il atteignit enfin l’autre côté de l’arbre pont. Il accéléra pour se retrouver au niveau d’Étoile de Nuage. La cheffe lui dit :

« Les tanières sont presque un peu petite… et nous avons besoin d’apprentis pour s’occuper des anciens.

- Les jeunes guerriers sont toujours disposés à s’occuper des anciens, vois-tu. Ce n’est pas parce qu'on n’es plus apprenti qu'on ne risque pas un jour ou l’autre d’aller à la cueillette de mousse pour les anciens, contra gentiment Matin Sauvage.

- Mais peut-être que nous pourrions avancer l’âge auquel on devient apprenti, proposa Étoile de Nuage. »

Matin Sauvage secoua la tête.

« Si je peux me permettre, nous avons déjà quatre apprentis et il me semble que Petite Feuille et Petite Noisette deviendront bientôt apprenties. Elles devraient devenir apprenties demain midi puisque demain matin, elles atteignent leurs six lunes. Ça fera donc déjà deux apprenties en plus, Étoile de Nuage. Inutile de t’inquiéter autant pour si peu.

- Oui, concéda la cheffe grise. J’avais oublié qu’elles devaient devenir apprenties. Enfin. Nous arrivons ! lança-t-elle aux guerriers du Clan qui étaient derrière eux. Matin Sauvage, dit à Plume de Feu qu’il est de garde cette nuit. »

Plume de Feu ? N’est-il pas mort ? J’ai raté quelque chose ? se demanda Matin Sauvage, déconcerté.

« Étoile de Nuage, Plume de Feu est mort, rappela-t-il à la cheffe. »

Cette dernière secoua nostalgiquement de la tête et entra dans le camp sans répondre. Dérouté, le mâle écaille scruta un instant la pénombre. Pelage de Tigre le bouscula et feula :

« T’arrêtes pas en plein milieu comme ça cervelle de souris ! »

Matin Sauvage marmonna une excuse et alla vers la tanière des guerriers. C’est sûrement qu’elle est encore perturbée par sa mort, tenta de se rassurer le lieutenant. Mais si Étoile de Nuage commençait à perdre la tête ? Si elle ne pouvait plus diriger le Clan ?


L’aube se levait doucement sur le camp du Tonnerre. Déjà, l’activité du camp commençait. Matin Sauvage bondit sur le Corniche et scruta la combe. Astre Blanc et Cœur Nocturne discutaient gaiement en marchant. Les deux chats s’approchaient justement de lui.

« Hé, Matin Sauvage ! miaula Cœur Nocturne en allant s’assoir aux côtés d’Astre Blanc, en face du lieutenant. »

Ce dernier se retourna et les fixa, le regard interrogateur. Astre Blanc ronronna et couva Cœur Nocturne d’un doux regard.

« J’attends nos chatons, de Cœur Nocturne et moi. Je voulais te dire que je rejoins la pouponnière aujourd’hui, donc.

- D’accord, ronronna Matin Sauvage, amusé de la complicité du couple. Reste un peu dehors, je vais demander à un apprenti de déplacer ton nid dans la pouponnière. »

La reine blanche remercia le lieutenant en clignant des yeux et s’éloigna, accompagnée de Cœur Nocturne. Ils s’allongèrent sur les pierres du haut de la combe, qui commençaient déjà à prendre le soleil. Le lieutenant se tourna vers la combe et se remit à scruter la combe, à la recherche de guerriers motivés pour une patrouille. Il repéra Belle Cerise et Chant du Moineau, qui discutaient tranquillement à l'ombre. Il sauta de la Corniche et s’approcha de Nuage de Ronce.

« Peux-tu déplacer le nid d’Astre Blanc dans la pouponnière ? demanda-t-il en arrivant en face de l’apprenti. »

Ce dernier se tourna vers Matin Sauvage et, un instant, celui-ci crut qu’il allait refuser, mais il finit par lâcher un soupir et rentrer dans la tanière des guerriers. Il ressortit peu après avec un gros paquet de mousse et de frondes sous le menton et dans la gueule. Matin Sauvage se détourna puis grimpa pour rejoindre Étoile de Nuage dans sa tanière. A sa surprise, c'était Bruine du Matin qui l'accueillit à son entrée.

- Où est Étoile de Nuage ? demanda Matin Sauvage.

- Elle est tombée malade cette nuit, certainement lorsque nous sommes rentrés de l’Assemblée. »

Matin Sauvage hocha de la tête et sortit à reculons de la tanière pour laisser la meneuse se reposer.


« Que tous ceux qui sont en âge de chasser s’approchent de la Corniche pour une nouvelle assemblée du Clan ! »

L’appel d’Étoile de Nuage résonna dans la combe. Les guerriers et les apprentis se rassemblèrent.

Le soleil de midi frappait la roche de son rayonnement éblouissant.

Matin Sauvage leva la tête vers la cheffe.

« Nous pouvons, dès aujourd’hui, compter deux nouveaux apprentis, commença Étoile de Nuage d'une voix rocailleuse. Petite Feuille, Petite Noisette, approchez, je vous prie. Moi, Etoile de Nuage, cheffe du Clan du Tonnerre, j’en appelle à nos ancêtres pour qu’ils se penchent sur ces chatons. Elles ont maintenant six lunes et sont dignes de devenir apprenties à leur tour. Petite Noisette, tu t’appelleras Nuage de Noisette. Matin Sauvage, je compte sur toi pour transmettre à ton apprentie ta sagesse. Petite Feuille, tu t’appelleras Nuage de Feuille. Plume de Merle, je sais que tu feras un excellent mentor. Je compte sur toi pour transmettre à ton apprentie ton enthousiasme. Nuage de Noisette, Nuage de Feuille, que le Clan des Étoiles guide vos pas jusqu’à ce que vous trouviez le chemin pour devenir des guerrières à votre tour.

- Nuage de Noisette ! Nuage de Feuille ! clama le clan. »

Nuage de Noisette s’approcha de Matin Sauvage et celui-ci lui posa la truffe sur la tête et lui murmura à l’oreille :

« On ira faire le tour du territoire ensembles dès que possible. »

La femelle ronronna de bonheur et Étoile de Nuage continua à parler :

« L’Assemblée est terminée, vous…

Chapitre II[]

Petite Glace cligna des yeux, éblouie par la vive lumière qui régnait dehors.

Comment les autres peuvent supporter autant de lumière ? se demanda la petite chatte. La femelle au pelage blanc venait d’ouvrir les yeux pour la première fois. Ses pupilles finir par s’adapter à la luminosité et autour d’elle, elle put voir la pouponnière.

C’était une grande tanière de joncs tressés. Entre les tiges de jonc, des feuilles et des pousses de roseau étaient glissées, bouchant les éventuels trous. La chatonne leva la tête. Au-dessus, les joncs filtraient une paisible lumière, non-plus agressive comme lorsqu’elle avait ouvert les yeux. Elle sursauta lorsque quelqu’un déboula dans la tanière.

« Allez, Petite Glace, ouvre les yeux, le monde est génial, dehors ! Oh ! »

Son frère, Petit Néant, venait d’arriver dans la tanière. Lorsqu’il vit sa sœur, il piailla de joie et, passant la tête par l’entrée, s’écria :

« Bourgeon d’Hiver, elle a ouvert les yeux ! »

Bourgeon d’Hiver déboula à son tour dans la pouponnière, les yeux brillants. Sitôt qu’elle vit sa fille, elle ronronna :

« Tu as ouvert les yeux ! »

La reine se frotta à la petite femelle blanche, qui ronronna à son tour.

« Allez, viens, on va visiter le camp ! miaula gaiement Petit Néant.

- Petit Néant, fait attention à toi… miaula Bourgeon d’Hiver avec un soupçon de regret dans la voix.

- Mais oui, maman, ne t’inquiète pas. Il faut juste que je m’y habitue. Mais je connais déjà le camp par cœur ! »

Bourgeon d’Hiver resta silencieuse, regardant son fils avec crainte, puis elle s’approcha et lui lécha la tête. Elle s’installa dans sa litière et regarda ses petits sortir de la pouponnière en sautillant.

Petite Glace lança un regard interrogateur à son frère. Pourquoi la reine s’inquiétait-elle tant pour son frère ? Pourquoi pas pour elle ?

Son frère tourna la tête vers elle.

« Dis-moi, comment as-tu su que j’avais ouvert les yeux ? questionna la chatonne blanche.

- Tu bougeais comme une poule d’eau, alors qu’avant, tu dormais comme une loutre ! s’exclama Petit Néant en ricanant.

- Mais ça se fait pas ! Tu vas le regretter, s’écria Petite Glace. »

La femelle se jeta sur son frère et les deux chatons formèrent une boule de fourrure noire et blanche. Soudain, les deux chatons butèrent sur quelque chose de mou. Or, ce quelque chose de mou, était Fol Œil. Celui-ci baissa la tête vers Petite Glace et gronda.

« Fais attention où tu vas, stupide boule de poils !

- Voyons, Fol Œil, tu sais bien qu’elle n’a pas fait exprès, miaula Écume Gelée depuis le Perchoir. »

La lieutenante se leva en souplesse et s’approcha des deux chatons.

« Ça vous dit, une balade à dos de castor ? demanda-t-elle, les yeux brillants d’une lueur malicieuse.

- Oh oui ! s’écria Petite Glace en grimpant sur la lieutenante, plantant ses petites griffes dans le pelage soyeux de cette dernière. Viens, Petit Néant ! »

Le mâle noir hésita, se balançant d’une patte à l’autre, ses petites prunelles grises baissées vers le sol tapissé de feuilles de hêtre. Puis il releva les yeux et demanda :

« Tu peux m’aider à monter, Ecume Gelée ?

- Bien sûr, ronronna la lieutenante. »

Elle prit le chaton entre ses crocs, tordit son cou derrière elle et posa le chaton noir sur son dos. Peu rassuré, celui-ci planta profondément ses griffes dans le pelage de la lieutenante et se tapissa sur son dos. Petite Glace lui donna un coup de museau pour le détendre et Écume Gelée commença à marcher d’un pas lourd.

« Oui ! piailla joyeusement Petite Glace. »

Petit Néant se détendit peu à peu et soudain, il se redressa d’un geste brusque. Il tomba à la renverse, basculant du dos de Écume Gelée et atterrit lourdement sur la tête. Il cria aussitôt de douleur.

Il n’est pas tombé de haut, il fait la comédie, se renfrogna Petite Glace.

Écume Gelée se pencha aussitôt sur lui, inquiète. Lorsqu’elle approcha suffisamment sa truffe, le petit chaton noir se releva d’un bond et s’agrippa derrière ses oreilles de ses petites griffes pointues. La lieutenante grogna de surprise et fit semblant de basculer lourdement vers l’arrière. Petite Glace se retrouva à moitié écrasée par Ecume Gelée, la patte de Petit Néant sur son museau. Elle feula de frustration et se dégagea rageusement.

La chatonne voyait bien que tout le monde préférait son frère à elle. Renfrognée, elle s’éloigna, fulminante de rage. La lieutenante du Clan de la Rivière ne releva même pas la tête, ne calculant pas que la petite chatte était partie. Tout le monde s’en fiche de moi, ici, se lamenta intérieurement Petite Glace en s’affaissant sur le sol, entre deux roseaux gigantesques. Elle sursauta lorsque qu’une queue se posa délicatement sur ses épaules. C’était Ombre d’Argent. La guerrière blanche aux reflets grisés s’allongea aux côtés de la petite chatte. Elle miaula doucement :

« Moi aussi, j’étais mise à l’écart, quand j’étais une petite chatonne comme toi. Petite Tempête et Petite Lune jouaient toujours avec Étoile de Roseau, qui s’appelait encore Patte de Roseau. Moi j’étais mise à l’écart, comme toi, gronda-t-elle de dépit. Aucun de mes frères et sœur n’étais aveugle, malformé ou je ne sais quoi… mais c’était moi. Et j’étais mise à l’écart, par ma différence. A l’époque, j’avais une patte tordue, mais Lune Rousse, qui était apprentie à cette époque, m’avait attribué des soins et des exercices quotidiens, pour redresser ma patte, expliqua la femelle blanche, devant le regard interrogateur que lui lançait Petite Glace. Et ça a fonctionné, ajouta-t-elle en tendant sa patte avant. Enfin, pour te dire que tu n’es, ni la première, ni la dernière à être exclue de la fratrie, en quelques sortes. Si tu as besoin de parler à qui que ce soit, je suis là pour t’écouter, termina-t-elle en se relevant pour aller à la réserve de gibier. »

A peine la guerrière s’était éloignée que Petit Néant arrivait en courant vers elle. Elle tourna la tête pour la poser sur ses pattes, vexée, mais réconfortée par les paroles douces et véridiques d’Ombre d’Argent. Son frère s’assit devant elle, haletant.

« Ça te dis, une exploration ? parvint-il à articuler entre deux respirations.

- On a déjà exploré le camp, grommela Petite Glace en tournant la tête.

- Non, pas le camp. L’extérieur du camp, corrigea Petit Néant, qui avait enfin retrouvé son souffle.

- Tu veux sortir du camp et enfreindre le code ?

- Nous ne sommes pas encore guerriers, nous ne devrions pas avoir à le suivre, rétorqua Petit Néant. Aux dernières nouvelles, ça s’appelle encore le code du guerrier. Et il n’y a pas encore de code du chaton, ironisa-t-il. »

Petite Glace releva la tête. Son frère la scrutait d’un regard impatient et suppliant.

« Allez, s’il te plaît… nous ne serons pas punis si on fait vite.

- D’accord, lâcha Petite Glace. Mais au moindre problème, on rentre au camp.

- Promis ! s’écria Petit Néant en sautant de joie. »

Il lui fit signe et se glissa sous un buisson de prêles. Petite Glace le suivit, son ventre frôlant le sol. Lorsqu’ils arrivèrent de l’autre côté, Petite Glace s’émerveilla. Le monde était beaucoup plus grand qu’elle ne l’imaginait. Des arbres se dressaient, çà, et là. Un petit ruisseau serpentait entre les touffes de roseaux. C’est alors que des pas lourds firent trembler le sol sous les pattes des deux chatons. Petite Glace poussa Petit Néant dans une touffe de roseaux plus hauts qu’eux et lui plaqua la queue sur la truffe.

« Une patrouille, chuchota-t-elle à Petit Néant, en retirant doucement sa queue. »

Le noiraud hocha de la tête et s’accroupit. En effet, Cœur Noir et Sens Vif arrivaient, des proies dans la gueule. Petite Glace entre-ouvrit sa gueule et identifia l’odeur d’un brochet, d’une carpe et d’une musaraigne. Une odeur musquée se camouflait parmi les autres, mais Petite Glace la sentait.

« Il était bon, ce lièvre, ronronna Cœur Noir. Heureusement qu’aucune patrouille du Clan du Vent n’est arrivée au moment où on l’a attrapé.

- Ils n’auraient pas pu nous gronder, nous les attrapons maintenant mieux qu’eux-mêmes, ronronna à son tour Sens Vif. »

Ils mangent des proies qu’ils ont chassé avant de rentrer au camp, et en plus, ils chassent ces proies sur le territoire du Clan du Vent ? s’alarma Petite Glace. Voyant la tête de son frère, elle comprit que le petit chat noir avait pensé à la même chose. Soudain une feuille se posa sur sa truffe et une envie irrésistible d’éternuer la prit. Elle se retint autant que possible, mais elle éternua, ne pouvant se retenir. Petit Néant lui fit les gros yeux. Sens Vif s’arrêta pour demander à Cœur Noir :

« Tu as entendu ce bruit ? »

Il s’approcha de la touffe de roseaux où les deux chatons étaient camouflés et gronda :

« Il y a une odeur de pouponnière.

- Tu dois rêver. Ou alors c’est toi qui portes encore l’odeur de la pouponnière, railla son camarade en s’asseyant. »

Sens Vif commença à enfoncer sa truffe dans les roseaux et grondant et s’arrêta.

« Ce ne devait être qu’un crapaud qui a attrapé un rhume, Sens Vif. Arrête de faire ton parano et viens, on rentre au camp.

- D’accord, bougonna le mâle en lançant un regard noir à la touffe de roseaux où les deux chatons étaient camouflés. Allons-y, ajouta-t-il en tournant la tête. »

Les deux guerriers s’éloignèrent et Petit Néant poussa un long soupir.

« Tu es folle ? On aurait pu se faire repérer ! sermonna-t-il sa sœur, avec humour. N’empêche, Sens Vif n’était vraiment pas loin. M’enfin.

- Allez, on reprend l’exploration ! s’exclama Petite Glace, respirant enfin. »

La chatonne blanche éternua de nouveau et elle se cogna la truffe contre la terre humide. Elle releva une truffe maintenant terreuse et Petit Néant éclata de rire :

« Tu ressemble à un gros castor, avec ton museau plein de terre !

- Attends un peu de voir à quoi toi tu ressembleras avec un museau plein de terre ! gronda Petite Glace. »

Elle se jeta sur son frère, qui la fit trébucher d’un coup de patte et s’éloigna à toute vitesse. Petite Glace tomba lourdement sur l’épaule et elle se releva et titubant. Il va voir ce qu’il va voir… songea-t­-elle, frustrée. Elle rejoignit son frère, qui s’était perché sur une des branches basses d’un hêtre. Elle planta ses petites griffes dans le bois tendre de l’arbre et tenta de se hisser jusqu’au noiraud. Au bout de maints efforts, elle finit par s’agripper à la branche où Petit Néant s’était perché. Celui-ci la taquina :

« Alors, c’est que maintenant qu’on arrive ? J’aurais eu le temps d’observer cinq coucher de soleil ! Je parie que t’es pas cap' de monter sur cette branche et d’aller jusqu’au bout, miaula-t-il en désignant une branche tordue un peu au-dessus d’eux. »

Petite Glace scruta la branche en frissonnant. Elle ne voulait pas se faire mal ni tomber, surtout qu’elle était déjà bien trop haut à son goût.

« T’as peur, la railla son frère. Regarde, c’est moi qui vais le faire. »

Le noiraud bondit sur la branche désignée et s’avança. Voyant ses gestes sûrs et mesurés, Petite Glace ne put qu’éprouver envie et jalousie. Petit Néant arriva au bout de la branche et se tourna vers sa sœur, l’air nonchalant.

« Tu vois, c’était simple, t’es vraiment une souris… »

Petit Néant ne termina pas sa phrase, il tomba à la renverse. Pour Petite Glace, la durée de sa chute lui sembla infinie. Elle essaya de descendre de l’arbre où elle était perchée mais aussitôt qu’elle aperçut le sol, bien trop loin à son goût, un vertige la prit et elle manqua de tomber elle aussi. Elle s’adossa contre le tronc, à la base de la branche où elle était et ferma les yeux, son cœur pulsant à toute vitesse dans son poitrail. Terrifiée, elle regarda son frère, qui était à présent étendu par terre, immobile comme un mort. Petite Glace sentit son cœur accélérer encore lorsqu’elle comprit que son frère était inconscient, et elle, coincée en haut d’un hêtre. Mortifiée, elle tourna la tête vers le ciel et miaula à plein poumons, sa plainte déchirant le silence paisible de la rive :

« Au secoouurs ! A l’aaiide ! »

Au bout de plusieurs minutes qui lui semblèrent une éternité, des bruits de course parvinrent aux oreilles de la chatonne. Elle vit alors Ombre d’Argent, Patte Sanglante et Pelage de Pluie arriver en courant. Sitôt qu’elle reconnu la guerrière, son père et la jeune guérisseuse, elle soupira de soulagement. Ombre d’Argent grimpa jusqu’à elle et fit glisser sa queue sur son dos, dans un geste voulu réconfortant. Angoissée autant pour elle que pour son frère, Petite Glace s’écria :

« Aide-moi à descendre, je dois aller voir Petit Néant ! »

Ombre d’Argent lui lança un regard plein de tendresse et la prit par la peau du coup. Puis elle se ramassa sur elle-même et sauta du hêtre. Elle atterrit en douceur sur la terre ferme et lâcha Petite Glace, qui se précipita aussitôt vers son frère. Elle s’approcha doucement de lui, les pattes tremblantes sous l’effet de la peur et secoua délicatement Petit Néant du bout de sa patte crottée.

Lorsque son frère releva sa tête, les yeux clos, une chose sauta aussitôt aux yeux de Petite Glace. Sa mâchoire formait maintenant un angle étrange. Elle était comme enfoncée et décalée à la fois, les os de sa mâchoire saillaient sous son pelage, ressortant horriblement.

« Étoile Balafrée... murmura Pelage de Pluie en s'éloignant de quelques pas. »

Chapitre III[]

« Ciel Gris, tu pars en patrouille de chasse avec Petite Patte, Brume Obscure et Épine Bleue, miaula soudain la voix de Pelage de Givre dans l’oreille du matou gris. »

Ciel Gris leva lentement la tête vers la lieutenante et hocha de la tête.

Au-dessus du camp de l’Ombre, la Toison Argentée brillait de milles éclats d’argent.

Il devenait de plus en plus difficile de trouver du gibier, plusieurs guerriers étaient déjà revenus les pattes vides. Petite Patte sortit par l’arche de roncières emmêlées, qui marquaient l’entrée du camp.

« Je propose que nous nous séparions, miaula Petite Patte, une fois sortit du camp de l’Ombre. Rentrez tous pour minuit au camp.

- D’accord, opina Ciel Gris, quoique peu convaincu par cette méthode de chasse.

- Nous pourrons en profiter pour vérifier les frontières, ajouta Brume Obscure.

- Bonne idée, dit Petite Patte. »

Ciel Gris se retourna et s’enfonça dans les taillis et s'éloigna. Il bondit par-dessus un fossé. Soudain, il leva la truffe. Une odeur musquée de souris flottait dans l’air. Il se tapit au sol et s’approcha doucement et silencieusement de la source de l’odeur.

La souris était cachée dans un buisson d’aubépine. Drôle de cachette, pour un rongeur, songea Ciel Gris avant de se faufiler discrètement sous le buisson. Une odeur suffocante le prit alors à la gorge.

L’odeur de la souris provenait en fait d’un cadavre de souris, à moitié enterré, qui était en plein décomposition. Le guerrier sortit à reculons du buisson épineux, les entrailles retournées par l’odeur, le poil en bataille. Étourdi, il s’éloigna, se rapprochant un peu plus de la frontière du Clan du Tonnerre. Il arriva au cours d’eau qui marquait la frontière et huma l’air, à la recherche d’une autre proie. En vain. Aucun fumet alléchant ne vint titiller ses narines. Il s’éloigna encore un peu plus du camp de l’Ombre. Peut-être qu’il trouveras plus loin. Alors qu’il humait l’air une énième fois, il sentit une odeur âcre flotter dans l’air.

« Des chats errants, gronda Ciel Gris pour lui-même. »

Ce n’était pas la première fois que le Clan de l’Ombre retrouvait des traces de chats errants.

Ciel Gris huma de nouveau l’air, sa gueule entre-ouverte. Il gronda pour lui-même et bondit sur ses pattes pour retourner au camp, prévenir Étoile de Faucon.

Lorsqu’il déboula, à cours de souffle, dans la clairière où leur camp était installé, il ne ralentit pas et entra en courant dans la tanière d’Étoile de Faucon. En entrant, il buta sur une racine distordue qui pointait hors du sol et se prit la paroi du petit tunnel qui menait à l’antre du chef.

« Étoile… de Faucon… des chats… errants à la fron… frontière, parvint-il à haleter, replié sur lui-même.

- Des chats errants ? répéta le meneur, qui avait levé la tête à l’entre chaotique du guerrier.

- Oui, je ne sais… pas combien ils… sont, j’ai juste sentit leur odeur…

- Bien, allons voir ça, miaula Étoile de Faucon en se levant. »

Le matou se dirigea vers la sortie de sa tanière avant de se retourner d’un air indécis :

« Tu restes là ? Je vais emmener Ombre de Feu et Cœur de Rat. Nous marquerons à nouveau la frontière, j’imagine que tu n’as pas songé à le faire, ajouta-t-il d’un ton quelque peu moqueur.

- Non, avoua Ciel Gris en grondant silencieusement. Je voulais te prévenir avant de faire quoi que ce soit, se défendit-il devant l’air exaspéré d’Étoile de Faucon. »

Le meneur ne répondit pas et se détourna brusquement. Il invita le guerrier gris à sortir de sa tanière d’un ample mouvement de la queue. Ciel Gris sortit, la démarche raidie par la colère.

Depuis qu'il était devenu guerrier, avec sa fratrie, Étoile de Faucon et ses plus proches adeptes n'avaient cessé de le soumettre à des moqueries et de multiples épreuves. Ni Ciel Gris, ni sa fratrie ne connaissaient l'origine de cette persécution. Ils subissaient chaque jour les piques de leur camarades, en particulier les chats les plus proches d’Étoile de Faucon. Nous nous arrachons les oreilles à leur faire comprendre que nous valons plus que de la crotte de merle, songea Ciel Gris en entrant dans la tanière des guerriers. Lorsque sa patte buta contre Petit Tigre, il cracha sur le petit mâle et se roula en boule dans son nid dans de grands gestes agressifs et désordonnés. La tête sur les pattes, il réfléchit. Son nid allait passer le pire de ses quarts d’heure, le matou enfonçait ses griffes dedans, le déchiquetait, réduisant à néant les effort de l’apprenti qui lui avait refait le matin même. Tant pis pour lui, il n’aura qu’a le refaire, songea Ciel Gris en fermant les yeux. Les même questions tournèrent dans sa tête, jusqu’à ce que le sommeil daigne de se pointer. Pourquoi autant de sarcasme ? Qu’avaient-ils fait, au juste, pour mériter tout cela ?


Ciel Gris fut réveillé par un miaulement :

« Hé, gros pataud, réveilles-toi, Étoile de Faucon a appelé une Assemblée du Clan. »

Le matou gris leva la tête, tiré d’un mauvais rêve. C’était Cœur de Rat qui l’avait réveillé. Le matou à poils courts était repartit, le pas lourd. Ciel Gris se leva. Pour une fois, j’ai presque envie de le remercier, songea le guerrier gris en sortant à son tour de la tanière. Il bailla à pleins crocs et alla s’asseoir à côté de Fleur du Marais. Il se pencha vers la femelle grise et lui murmura :

« Que se passe-t-il ?

- Tous les chatons vont devenir apprentis, et Nuage d'Épine va devenir guerrier, je crois.

- Seulement Nuage d'Épine ?! s’étonna Ciel Gris. »

D’habitude, les fratries devenaient apprentis et guerriers en même temps. Fleur du Marais lui répondit :

« Moi aussi, je suis surprise. Ce n’est pas courant qu’un seul apprenti d’une fratrie devienne guerrier, et pas les autres. Je ne sais pas à quel jeu joue Étoile du Faucon, mais c’est un mauvais jeu, à coup sûr. C’est à risque de s’attirer les foudres des autres guerriers ou apprentis.

- Chut, miaula furieusement Griffe d'Aubépine en se retournant vers les deux guerriers. Vous parlerez après. »

Ciel Gris lança un regard d’excuse à la guerrière.

« Quelle boule de poils autoritaire, glissa-t-il à sa voisine. »

Fleur du Marais ronronna et enlaça sa queue à celle du guerrier gris.

« Aujourd’hui est un grand jour pour le Clan de l’Ombre, lança Étoile de Faucon. Nul Clan ne peut survivre sans nouveau guerrier. Châtaigne Morte, est-ce que Nuage d'Épine est prêt ?

- Oui, assura Châtaigne Morte. Il s’est bien entraîné.

- Dans ce cas, moi, Étoile du Faucon, chef du Clan de l’Ombre, en appelle à nos ancêtres pour qu’ils se penchent sur cet apprenti. Il a travaillé dur pour comprendre les lois de votre noble code, et est maintenant digne de devenir guerrier à son tour. Nuage d'Épine, promets-tu de respecter le code du guerrier, de protéger et défendre ton Clan, même au péril de ta vie ?

- Non. Pas si je suis aujourd’hui le seul à devenir guerrier, répondit l’apprenti noir. »

Il parcouru l’assemblée du regard, les yeux brûlants.

« Je ne deviendrais pas guerrier si mes camarades, avec qui j’ai grandi, avec qui j’ai fais mon apprentissage, qui on tous fais leur six lunes d’entraînement, dont leur mentor son fiers, ne deviennent pas aussi guerriers.

- Ils deviendront guerriers quand je le voudrais, cracha Étoile de Faucon.

- Et moi, je deviendrais guerrier quand je le voudrais, cracha à son tour Nuage d'Épine, le poil en bataille. »

Pelage de Givre s'approcha se redressa de toute sa grandeur et gronda, d’une voix à peine plus forte qu’un murmure :

« Dans ce cas, pars. Pars et ne reviens jamais. »[1]

Nuage d'Épine, la queue haute et battante, se redressa et sauta au sol pour se diriger vers la sortie du camp.

« Personne ne partira nulle part, aujourd’hui ! tonna la voix d’Étoile de Faucon. Nuage d'Épine, reviens ici.

- Non, je refuse de rester dans un Clan où le chef devient fou ! protesta Nuage de Genièvre en donnant un coup de patte à Étoile de Faucon, les griffes rétractées. »

Des hoquets de stupeur retentirent dans l’Assemblée. Après un long silence, qui parut durer des heures à Ciel Gris, Nuage d'Épine tourna les talons en lançant :

« Peut-être que je reviendrais, un jour. »

Ciel Gris hoqueta et se pencha vers Fleur du Marais.

« Étoile de Faucon est fou !

- Peut-être, mais au moins, Nuage d'Épine a intelligemment riposté, miaula doucement Fleur du Marais, d’une voix chagrinée.

- Mais où va-t-il aller ? demanda Ciel Gris. Au Clan du Tonnerre ? Au Clan de la Rivière ? Au Clan du Vent ?

- Je ne sais pas. Mais il est fort, il survivra, le rassura Fleur du Marais. Viens, allons chasser, peut-être que nous pourrons croiser Nuage d'Épine et lui demander où est-ce qu’il ira. »

Ciel Gris hocha de la tête. Autour d’eux, les chats du Clan conversaient, choqués ou bien tristes. Le cœur du guerrier gris se serra encore davantage lorsqu’il vit Nuage d’Abeille, qui était inconsolable. Alors qu’il s’approchait de la femelle, Fleur du Marais l’invita à la suivre d’un regard insistant.

« Mieux vaut laisser sa famille la réconforter, expliqua-t-elle au matou gris, une fois qu’ils furent sortis du camp.

- Tu as certainement raison, soupira Ciel Gris. N’empêche, je me demande bien où est allé Nuage d'Épine… et si nous le reverrons un jour.

- Cela, seul le Clan des Étoiles le sait, miaula Fleur du Marais d’une voix solennelle. »

Chapitre IV[]

Printemps Gelé leva la tête. L’air frais lui picota la truffe, mais elle ne dit rien. À côté d’elle, Truffe Cendrée se lamenta :

« Voilà bientôt deux jours, que la maladie a frappé. Certes, deux jours, ça ne fait pas beaucoup mais…  Nous ne connaissons toujours pas le remède… Nous avons tout essayé, bourrache, baies de genièvre, herbe à chat, pas-d’âne… continua Truffe Cendrée.

- Peut-être que le Clan des Étoiles veut que nous périssions, soupira Museau Fendu. »

La maladie avait rendu l’ancien aveugle. Or, les deux guérisseuses du Clan du Vent n’avaient toujours pas trouvé de remède, et guettaient le moindre signe du Clan des Étoiles. Sentant le regard insistant de ses camarades sur ses épaules, Printemps Gelé miaula :

« Le Clan des Étoiles ne nous abandonnera pas. Tôt ou tard, nous finirons par trouver le remède…

- Mais nous ne pourrons pas mentir à tous les Clans délibérément pendant des lunes, souffla Étoile d'Or, un panache blanc se formant devant sa gueule, qui se fit emporter par le vent. Si nous venons de moins en moins nombreux aux Assemblées, les autres Clans pourraient nous croire faibles, et tenter d’attaquer notre territoire, en voler une partie… Et avec la mauvaise saison qui arrive, nous ne pouvons pas nous le permettre, conclu le vieux matou dans un frisson. »

Les quatre chats se turent, fixant le lointain d’un œil fatigué.

« Mais que fait-elle ? marmonna Etoile d'Or en tendant le cou pour observer le torrent plus bas. »

Les félins étaient postés sur une colline à l’herbe qui était autrefois douce et ployable était maintenant gelée, dure et craquante sous leurs pattes. En contrebas, au pied de la colline, Truffe d'Écureuil observait la rive opposée d’un air préoccupé. Sur cette rive opposée, Ciel Givré, une femelle au pelage blanc moucheté, la lieutenante du Clan du Vent, parlait avec un grand guerrier crème, un guerrier du Clan du Tonnerre.

« Il faut vraiment être désespéré, pour en arriver là, soupira Printemps Gelé en clignant des yeux. »

Ses cils gelés craquèrent.

« Je vais descendre rejoindre Ciel Givré. Truffe Cendrée, viens avec moi. Si jamais on peut ramener un remède, il faut qu’on en ramène le plus possible. »

Printemps Gelée se leva et crut un instant que ses pattes allaient lâcher. Tremblante, elle avança, ne laissant rien paraître.

« Prend soin d’elle, entendit-t-elle Étoile d'Or murmurer à Truffe Cendrée. »

La femelle grise hocha de la tête puis suivit Printemps Gelée jusqu’à Truffe d'Écureuil.

« Faîtes attention en traversant, indiqua la femelle rousse aux deux guérisseuses en s’écartant pour leur laisser l’accès aux pierres permettant de traverser le torrent. Les eaux sont agitées aujourd’hui, et nous ne pouvons pas perdre nos deux seules guérisseuses. »

Printemps Gelé remercia la guerrière d’un hochement de tête et avança sur la première pierre. Puis elle bondit sur la suivant en retenant son souffle, terrifiée par les eaux tourbillonnantes en-dessous d’elle. Clan des Étoiles, fait que je ne tombe pas, pria-t-elle en inspirant profondément. Si je tombe, je me briserais la nuque à coup sûr.

La chatte brune se ramassa sur elle-même puis bondit jusqu’à la suivante. À ce moment-là, un cri retenti dans le silence de l’hiver :

« Printemps Gelé, attention ! »

La guérisseuse se tourna vers Truffe d'Écureuil, qui avait crié, et se figea en voyant une immense branche, portée par le courant comme une feuille flottant dans une flaque, qui fonçait dangereusement vers elle.

« Printemps Gelé, dépêche-toi ! hurla Truffe Cendrée dans ses oreilles. »

La femelle grise prit la guérisseuse par la peau du cou et, trébuchant contre les pattes de son ancien mentore, bondit de pierre en pierre, jusqu’à la rive. Une fois arrivées sur la rive, les deux chattes reprirent leur souffle et Printemps Gelé miaula d’une voix qui lui parut rauque :

« Merci, Truffe Cendrée. Tu as sauvé ma vie.

- Mais aussi la mienne, rétorqua celle-ci. Si tu n’avançais pas d’une quelconque manière, nous aurions toutes les deux périt.

- Désolée, s’excusa Printemps Gelé, son cœur tambourinant contre son poitrail. »

Truffe Cendrée s’ébroua. De petites gouttelettes d’eau giclèrent sur la truffe de Printemps Gelé. Il ne manque plus que les guerriers du Tonnerre pensent que nous sommes des poissons, ronchonna la guérisseuse brune en s’ébrouant à son tour. Elle se releva et suivit tant bien que mal son ancienne apprentie jusqu’à Ciel Givré. Lorsque la guerrière vit les deux guérisseuses approcher, elle alla à leur rencontre et leur annonça :

« Patte de Velours m’a dit que vous pouviez aller jusqu’à leur camp pour parler aux guérisseurs, mais que...

- Très bien, allons-y alors, la coupa Truffe Cendrée.

- Mais qu’aucun guerrier ne vous accompagnera, termina Ciel Givré malgré l’intervention de la femelle grise. »

Un silence s’en suivit. Puis Patte de Velours interpella les trois femelles d’une voix fatiguée et tendue :

« Hé, là-bas, vous vous décidez ou quoi ? J’ai pas toute la journée moi !

- Ça va, ça va, on arrive, soupira Truffe Cendrée »



« Nous sommes arrivés, annonça Patte de Velours. La tanière des guérisseurs est…

- Nous savons où est la tanière des guérisseurs, merci, le coupa Printemps Gelé en marchant aussi vite que lui permettaient ses membres engourdis par le froid. »

Patte de Velours lui jeta un regard courroucé, puis il se détourna et entra rapidement dans une tanière.

Au-dessus du camp, au-dessus de toutes les têtes des guerriers, un oiseau, inconnu à la guérisseuse, laissa couler dans l’air silencieux et glacial une note, quoique mélodieuse, douce et chaude, mais qui sonna comme un avertissement. Les feuilles mortes qui couvraient le sol rugueux et dur de la combe, craquaient sous les pattes des deux femelles. Leur démarche décidée résonnait doucement contre les parois de la combe lorsqu’elles arrivèrent devant la tanière desdits guérisseurs. À l’intérieur, une chaleur doucereuse planait, l’air emplit de parfum d’herbes et de fleurs picota agréablement les narines de Printemps, qui s’annonça :

« Bruine du Matin ? C’est Printemps Gelé et Truffe Cendrée. Nous avons à te parler, à toi et Feuille Douce.

- Je sais. Quelque chose te préoccupe, murmura la guérisseuse, une patte plongée dans la fissure qui abritait ses remèdes. Le Clan du Vent a des ennuis peut-être ? »

C’est cet instant là que Feuille Douce choisit pour entrer. Son pelage, trempé par la pluie soudaine qui s’était abattue sur les vertes terres du Clan du Tonnerre, goutta sur le sol rocheux.

« Oh, Printemps Gelé ! Et Truffe Cendrée ! miaula la femelle brune en s’ébrouant. Quel bon -ou mauvais peut-être- vent vous amène ?

- Nous avons beaucoup de malades au camp, certains sont en incapacité de faire le moindre mouvement, tant la maladie les a vidé de tout énergie, expliqua rapidement Truffe Cendrée. Nous ne savons toujours pas de quelle maladie il s’agit… et… nous avons besoin d’aide !

- Étoile d’Or a déjà perdu une vie, murmura Printemps Gelé. Et si ça continue, il ne restera personne dans le Clan. Il sera détruit. »

Bruine du Matin prit un air sceptique et demanda :

« Vous n’êtes pas que venus pour ça, je le sens.

- Effectivement, avoua Printemps Gelé. En ce moment, nous trouvons de plus en plus de marques d’invasion. Des chats, chaque jour, s’enfoncent un peu plus dans le territoire. Des temps troublés arrivent, je le sens.

- Ils ne font pas qu’arriver, gronda Feuille Douce. Si vous êtes victime d’une maladie inconnue à tous les guérisseurs, c’est qu’ils sont déjà là.

- Nous sommes déjà allés voir le Clan de la Rivière et le Clan de l’Ombre. Vous étiez notre dernière chance, murmura Truffe Cendrée en baissant la tête. »

Feuille Douce se frotta à elle pour la réconforter, peinée par l’air désolé de la femelle grise. Puis les deux guérisseuses du Clan du Tonnerre se concertèrent d’un regard et Bruine du Matin annonça d’un ton inquiet :

« Sur le territoire du Tonnerre aussi, on a des invasions. Et aussi du côté du Clan de l’Ombre. Nous pensions au début que ça venait d’un autre Clan, mais peut-être pas, au final. Si vous dîtes que vous aussi, vous avez relevé des invasions… ça ne peut pas venir de nous, en tout cas. »

Bruine du Matin s’allongea sur son nid et miaula :

« Mais parlez-nous de la… soi-disant maladie. Qu’est-ce qu’elle fait aux malades ?

- Museau Fendu est devenu aveugle, cracha Printemps Gelé, dépitée de n’avoir rien pu faire pour son camarade. Pelage Feuillu est… à l’article de la mort, Étoile d’Or a perdu une vie…

- D’accord, la coupa Feuille Douce, de fines gouttelettes perlant sur son long pelage et s’écrasant au sol. Mais quels sont les symptômes ?

- Pelage Feuillu a de l’écume à la gueule… il est parfois prit par des convulsions…

- De l’écume à la gueule ? questionna Feuille Douce.

- Oui, de l’écume à la gueule, confirma Truffe Cendrée. Au début, on a pensé à une sorte de rage, comme l’épidémie qui avait touché les Clans il y a longtemps, donc on lui a donné de l’herbe à chat, mais ça ne fait rien… et si on le laisse comme ça encore longtemps, il va finir par mourir, vidé de ses forces…

- Quand est-il tombé malade ? demanda Bruine du Matin. Il y a longtemps ou récemment ?

- Je dirais… il y a un peu moins d’une lune, miaula Truffe Cendrée avec inquiétude. Et chaque jour qui passe, il se vide un peu plus de ses forces. Nous lui donnons un mélange de baies de Genièvre. Au début, sa maladie ne nous inquiétait pas plus que ça, elle avait tout de banal, comme un simple rhume. Mais du jour au lendemain, le matin de l'assemblée, il est tombé gravement malade.

- A ce propos… murmura Printemps Gelé, nous ferions mieux de rentrer… si jamais vous avez la moindre idée… nous la prendrons avec joie. Si aucun remède n’est trouvé d’ici la nouvelle saison, le clan tout entier mourra. Et… je crains que la maladie n’atteigne les autres clans.

La guérisseuse tourna les talons et sortit de la tanière des guérisseurs. A peine sortie, elle se détendit, apaisée par l’odeur de la pluie, et son martellement sur le sol dur, froid et maintenant humide. Cela dit, il ne faudrait pas que nos réserves gèlent.


« Ils ne connaissent pas de remèdes possibles, alors ? demanda la voix mélancolique de Museau Fendu. »

- Non, miaula Printemps Gelé, la tête basse. »

Tout le calme qu’elle avait acquis en retournant sur le territoire du Clan du Vent, escortée par Patte de Feu, s’était envolé. Le stress et l’inquiétude l’avait gagné, remplaçant les doux traits de son museau par des traits tirés et fatigués, comme vieillis.

« Nous finirons forcément par trouver, miaula Étoile d’Or.

- Certainement… soupira la guérisseuse.

- Rentrons, dit Truffe d'Écureuil, qui les avait rejoins avec Ciel Givré. Nous avons laissé seuls nos camarades déjà bien longtemps.

- Guettez le moindre signe du Clan des Étoiles, termina Étoile d’Or. »



Printemps Gelé manqua de tomber, ses coussinets dérapant sur une flaque gelée. Elle retourna sur la terre ferme prudemment, et soupira de soulagement en apercevant l’entrée du camp, qui pointait au loin. Elle pressa l’allure, et, quelques instants plus tard, elle entrait dans le camp, frigorifiée jusqu’au plus profond d’elle-même. Le vent sifflait dans ses oreilles, portant des feuilles brunies. Le sol du camp craquelait un peu sous ses pattes, gelé par le froid, et rendu glissant par endroit par la pluie. Printemps Gelé sursauta lorsqu’une grosse goutte lui tomba sur la truffe, à l’entrée de sa tanière. Elle secoua la tête et entra dans la tanière, où l’air humide et froid mettait à vif ses poumons. Elle s’ébroua.

« Printemps Gelé… »

La guérisseuse sursauta à nouveau en entendant son nom et se tourna vers Truffe Cendrée, qui l’avait appelée. La femelle grise était penchée sur Pelage Feuillu, dont les flancs étaient… anormalement immobiles. Printemps Gelé s’approcha et, du bout de la patte, elle toucha le corps de Nuage de Fougère. Un froid terrifiant avait remplacé la forte chaleur de la fièvre. Un froid, qui, Printemps Gelé le savait, ne faisait que refléter la mort de l’apprenti. Elle frissonna et baissa la queue. Truffe Cendrée miaula d’une voix rauque :

« Il est mort. »

Ces trois mots résonnèrent dans le silence du camp troublé par le martellement de la pluie, sonnant la défaite du combat de Pelage Feuillu contre la maladie. Le jeune mâle avait perdu l’entièreté de ses forces. La maladie avait gagné de lui, naturellement.

Chapitre V[]

« Attendez ! lança une voix précipitée, coupant Étoile de Nuage. »

Un matou roux clair aux beaux yeux vert pomme arriva dans la combe en marchant, prudent.

« Qui es-tu, et que fais-tu dans mon camp ? cracha Étoile de Nuage en hérissant son pelage gris. »

La meneuse se ramassa sur elle-même, prête à bondir sur le chat roux en cas de nécessité, mais Matin Sauvage l’arrêta.

« Étoile de Nuage, non ! Écoutons ce qu’il a à nous dire. S’il est venu jusqu’ici, c’est forcément qu’il y a une bonne raison. »

Le matou roux clair remercia le lieutenant d’un regard légèrement effrayé, qui fit de la peine à Matin Sauvage, et miaula :

« Je viens de loin, je voudrais savoir si vous accepteriez de me laisser me joindre à vous… »

Étoile de Nuage ouvrit furieusement la gueule et le mâle roux clair dut le remarquer puisqu’il miaula :

« Ne me renvoyez pas ! J’aime beaucoup votre mode de fonctionnement, je vous observe depuis un quart de lune. S’il vous plaît, ajouta-t-il en voyant Étoile de Nuage qui allait refuser. Laissez-moi une lune, pour m’intégrer. Si je ne réussis pas, je partirais.

- D’accord, céda Étoile de Nuage en grognant. Une lune, pas plus, pas moins. Mais je ne comprends toujours pas pourquoi tu souhaite nous rejoindre. Enfin, soupira la cheffe, en se relevant, ses muscles puissants se détendant sous son pelage lustré. Quel est ton nom ?

- Je m’appelle Rio, répondit le mâle roux en bombant un peu le poitrail.

- Dans ce cas, suis-moi Rio. Tu vas devoir changer de nom, si tu veux rester.

- D’accord, répondit Rio en inclinant poliment la tête vers la meneuse. »

Étoile de Nuage fondit la masse de chats qui s’étaient accumulés autour de la discussion. Puis le femelle bondit sur la Corniche et clama :

« Que tous ceux qui sont en âge de chasser, reviennent près de la Corniche pour une nouvelle assemblée du Clan ! »

Les chats du Clan du Tonnerre reprirent place devant leur cheffe dans un grand brouhaha et ce dernier miaula :

« Chats du Clan du Tonnerre ! J’ai accordé à ce chat une lune pour s’intégrer dans le Clan. Rio, approche. »

Le matou roux clair s’approcha en tremblant, excité. Étoile de Nuage soupira et l’écarta d'elle du bout de la patte alors qu’il s’apprêtait à se frotter contre elle. Matin Sauvage ronronna, cette scène lui rappelant à quel point lui-même était excité lors de son baptême d’apprenti.

« Rio, tu seras désormais connu sous le nom de Nuage, miaula haut et fort Etoile de Nuage, afin que chacun l’entende. Tant que tu n’auras pas intégré à part entière le Clan, tu n’auras pas un vrai nom de Clan. Cependant, il est de coutume que tu sois formé comme un véritable apprenti, afin que tu apprennes le code du guerrier ainsi que l'art du combat et de la chasse. Plume de Corbeau ! Ta force au combat et ta vivacité seront utiles à ce chat, je compte sur toi pour le former, comme ton mentor l’a fait pour toi. L’assemblée est close ! ajouta-t-elle. »

Les chats du Clan du Tonnerre se dispersèrent. Étoile de Nuage fit signe à Matin Sauvage de s’approcher, et ils sortirent du camp pour parler en toute sérénité.

Le pelage des deux chats reflétait la puissance lumineuse du soleil, leur donnant un aspect éclatant, contrastant avec les nuages moutonneux qui commençaient à voiler la voûte céleste d’azur.

« Nous devons surveiller davantage le territoire, commença Étoile de Nuage une fois qu’ils furent hors de portée des oreilles indiscrètes. Ces invasions… sont devenue presque quotidiennes, et il y en a visiblement de jour comme de nuit. Je crains que ce soit le Clan du Vent et le Clan de l’Ombre qui empiètent sur notre territoire, gronda-t-elle. Et je ne peux pas supporter cette idée. Le Clan du Tonnerre ne se laissera pas marcher sur les pattes. Donc je veux que tu organise des sentinelles. Tu placeras deux guerriers à différents endroits sur les frontières, mais avant ça, je veux que tu parte en patrouille pour identifier les meilleurs lieux où placer les sentinelles. Et, je ne veux pas que les informations fuitent aux autres clans… passer pour des faibles ne nous aidera pas.

- D’accord, Étoile de Nuage. Y a-t-il des guerriers en particulier que tu veux voir en sentinelle ?

- Non, pas spécialement, répondit pensivement la cheffe après un instant de réflexion. Tu pourras les organiser cet après-midi, après la patrouille visant à trouver les meilleurs endroits. Et, essaie de tourner, sur les guerriers. Que ce ne soit pas toujours les mêmes.

Matin Sauvage opina et retourna au camp et alla à la pouponnière tout en réfléchissant aux guerriers qu’il enverrait en sentinelle. Il passa la tête par l’ouverture et vit qu'Aile de Papillon, Plume Légère et Bruyère Fleurie étaient réveillées et regardaient leurs chatons jouer, pleines d’amour et d’allégresse. Matin Sauvage ronronna en voyant les petites boules de poils batailler sur le sol tapissé de mousse et de plumes, où de fins rayons de lumières venaient moucheter le sol ombré. Il rejoignit sa compagne et s’allongea auprès d’elle.

« Qui était le chat qui est arrivée, tout à l’heure ? demanda Bruyère Fleurie en baillant.

- Un matou roux, qui voulait rejoindre le Clan. Étoile de Nuage lui a donné un délai d’une lune, pour qu’il s’intègre au Clan. S’il ne réussit pas, il devra partir, mais sinon, il restera et sera baptisé en tant que guerrier à part entière.

- Je ne sais pas si c’est une bonne idée d’accueillir des guerriers à tout va, nous sommes déjà beaucoup, grommela Bruine du Matin, qui arrivait dans la pouponnière pour examiner Aile de Papillon et Plume Légère.

- Mais une patte d’œuvre supplémentaire ne fera pas de mal au clan, rétorqua Aile de Papillon, en agitant la queue pour chasser Petit Sang, qui jouait avec. »

Le petit s’éloigna en courant et sauta sur son frère, Petit Doré, qui poussa un cri d’indignation lorsque ses petites pattes cédèrent sous le poids du mâle au pelage noir. Astre Blanc entra dans la pouponnière et miaula :

« Bruine du Matin, tu peux venir quelques instants ? Cœur Nocturne ne se sent pas très bien, il aimerait que tu vérifie qu'il n'a rien de grave. »

La guérisseuse se releva et suivit la guerrière, après avoir lancé un regard d'excuse aux reines. Feuille Douce entra quelques instants après et demanda :

« Bruine du Matin vous a déjà examiné ?

- Oui, ne t’inquiète pas, la rassura Aile de Papillon. En revanche, tu peux aller voir les anciens, Patte Vive m’a dit qu’il avait mal aux articulations ce matin. D’ailleurs, emmène les chatons avec toi, ça nous fera du calme. Oreille Pointue pourra les occuper pour un certain temps, soupira-t-elle. »

Feuille Douce hocha de la tête et entraîna les chatons en dehors de la pouponnière. L’ambiance désormais dénuée de tous couinements, cris et miaulements était calme et apaisante. Matin Sauvage lécha la tête de Bruyère Fleurie puis se leva pour faire les patrouilles de l’aprè-midi.

Une pluie torrentielle commença à s’abattre sur les terres du Clan du Tonnerre. La pluie, épaisse, donnait un aspect gris et fade au paysage d’habitude vert et vif. Le soleil qui dominait sur le ciel au-dessus du territoire était désormais voilé par d’épais nuages orageux. Matin Sauvage plissa les yeux pour les protéger de la pluie et cria à sa patrouille :

« Nous allons rentrer au camp ! Il pleut trop fort, on ne voit pas le bout de notre truffe, c’est dangereux ! De toute façon, nous avons trouvé les endroits qu’il fallait, nous laisserons les guerriers désignés pour les sentinelles y aller un peu plus tard ! »

Astre Blanc et Fleur du Printemps acquiescèrent, les yeux plissés et, suivies par le lieutenant, firent demi-tour pour retourner au camp. Matin Sauvage cru apercevoir Feuille Douce qui rentrait elle aussi au camp, mais avec la pluie, il lui fut impossible de confirmer sa vision – aussi véridique puisse-t-elle être.

Dès qu’ils pénétrèrent dans le camp, ils allèrent chacun se mettre à l’abri dans des tanières du camp. La hauteur des parois de la combe protégeaient déjà le camp du vent glacial. Matin Sauvage alla voir sa compagne, à la pouponnière. Il rentra et s’ébroua en frissonnant. Les chatons jouaient encore, et ils poussèrent de petits cris joyeux lorsque le lieutenant répandit de petites gouttelettes d’eau sur le sol moelleux.

« Il pleut fort, dehors, les chatons ne doivent pas sortir, miaula-t-il à l’attention des reines.

- Oui, il ne fait vraiment pas beau… soupira Aile de Papillon d’un air maussade.

- Pourtant, la journée avait bien commencé, renchérit Plume Légère, qui avait levé la truffe de son nid. Mais bon…

- Les chatons, on va faire une sieste, ordonna Bruyère Fleurie. Il ne fait pas beau et il fait froid, alors arrêtez de gigoter dans tous les sens et venez plutôt dormir. »

Petit Sang baissa la queue, attristé, et rejoignit Aile de Papillon en ronchonnant. Matin Sauvage remercia sa compagne d’un coup d’œil amoureux, et le lieutenant sortit de la pouponnière. Son crâne fut aussitôt assailli par la violente pluie épaisse qui tombait dehors. Matin Sauvage, nullement découragé par la pluie, se secoua et plissa les yeux, avançant presque à l’aveuglette dans le camp pour en sortir. Il se sortit donc du camp et se dirigea vers le Grand Chêne. De là-haut, il verrait tous les territoires. L’herbe mouillée couinait sous ses pattes et la pluie torrentielle fouettait la truffe du lieutenant. Ce dernier grimpa avec peine jusqu’à une branche dépourvue de feuilles, lui laissant entrevoir les quatre territoires des autres clans. Les nuages se déplaçaient à une vitesse hallucinante dans le ciel, des vents puissants et glacials rasaient les plaines du Clan du Vent à la couleur grisée par le temps maussade. La pluie venait faire déborder les courts d’eau du Clan de la Rivière, déjà bien remplis par les dernières pluies. Les rafales agitaient les hauts pins qui garnissaient la forêt du Clan de l’Ombre.

La pluie n’en a pas finit avec nous j’en ai bien peur. Les malheurs non plus, certainement, songea-t-il, le regard plongé dans le lointain gris et orageux.

Chapitre VI[]

Printemps Gelé baissa les yeux. Elle avait, certes, vu maintes camarades mourir de vieillesse, de froid ou même d’une blessure mais… jamais par son impuissance face à une maladie. Le silence se fit. Au bout de quelques instants, Truffe Cendrée s’approcha de son ancienne mentore et se frotta a elle silencieusement, dans l’espoir de la réconforter.

« Nous… devrions prévenir sa famille maintenant. »

Elle se tourna vers la sortie, et voyant que Printemps Gelé ne la suivait pas, elle insista doucement :

« Allez, viens. Il n’y a plus rien à faire. Il est mort. »

Printemps Gelé se leva lourdement. Ses pattes semblaient s’être transformées en pierre, en marbre, son cœur qui battait la chamade quelques instants auparavant s’était calmé et pulsait lentement, ralenti par la tristesse de la guérisseuse. Le pire n’étais pas toujours de voir mourir un jeune chat, mais de devoir l’annoncer à la famille du défunt. Elle sortit de la tanière des guérisseurs à la suite de Truffe Cendrée et une pluie drue s’abattit sur elle, alourdissant encore plus son pelage qu’elle n’en avait déjà l’impression.

« Truffe Cendrée ? miaula-t-elle d’une voix rauque. »

La femelle grise se retourna, un voile de tristesse masquant ses airs d’habitudes malicieux et joyeux.

« Je… c’est de ma faute ? demanda la femelle brune, s’arrêtant au centre du camp pour contempler les étoiles, qui apparaissaient entre les nuages, malgré la pluie épaisse qui tombait.

- Bien sûr que non, soupira Truffe Cendrée en levant des yeux voulus exaspérés au ciel sombre. Il était temps pour lui de partir, le Clan des Étoiles l’avait appelé. »



Les nuages avaient levé leur voile gris pour laisser place à un soleil timide et hivernal. Printemps Gelé ouvrit péniblement les yeux. Elle et Truffe Cendrée avaient annoncé la mort de Pelage Feuillu à son frère, Patte de Lapin. Le mâle avait été désemparé, et depuis, il refusait de manger, de dormir, ou de faire sa toilette. Ce matin là, il était assit sur un rocher plat, ses yeux couverts d’un voile désespéré mi-clos, observant vaguement le lointain.

A ce moment, Cœur de Pierre, Lune de l’Aube et Oreille de Belette arrivèrent à toute vitesse dans le camp, comme si un blaireau les poursuivait.

« Étoile d’Or ! Où est Étoile d’Or ? demanda précipitamment Lune de l’Aube, essoufflée.

- On me cherche ? fit le meneur, en sortant de sa tanière d’un pas lent.

- Oui, Étoile d’Or, confirma Cœur de Pierre en s’approchant, parlant haut et fort afin que tous les guerriers présents dans le camp l’entendent. Il s’agit d’Étoile de Roseau et de ses guerriers. Il… il veut te parler.

- A-t-il mentionné la raison de cette entrevue inventée à la va-vite ? questionna Étoile d’Or qui s’asseyait, contrarié, en battant de la queue.

- Non, miaula Oreille de Belette. Mais il avait l’air pressé. »

Il y eut un silence, dans le camp. Le temps semblait s’être arrêté, et tous étaient suspendus aux lèvres du meneur. Le vent siffla entre des roches. Printemps Gelé frissonna et leva la tête. Il va pleuvoir, encore ?

« J’irais, soupira Étoile d’Or. A-t-il seulement mentionné une présence particulière ?

- Non, affirma Cœur de Pierre en clignant des yeux. Il a juste demandé ta présence.

- Bien, alors Cœur de Pierre, Oreille de Belette et… et ça sera tout. Vous viendrez avec moi. Et… Truffe d’Écureuil, tu restera en retrait pour aller chercher des guerriers si nécessaire. »

Printemps Gelé nota que le regard du chef avait effleuré le sien, mais il avait secoué la tête et s’avançait déjà vers la sortie du camp, suivit de près par les trois guerriers désignés pour l’accompagner. Clan des Étoiles, faites qu’il n’y ait rien de grave…

Le camp attendit en silence le retour du chef, aucun bruit n’y résonnait comme on avait l’habitude. Le vent soulevait des feuilles mortes et des plumes, et il se faufilait entre les rocs du camp en sifflant. Chacun redoutait la venue de Truffe d’Écureuil au camp, qui signifierait qu’une bataille se serait déclenchée. Printemps Gelé finit par s’allonger, repliant ses pattes blanches sous son poitrail.

Étoile d’Or réapparut à l’entrée du camp au bout de longs instants, suivit de Cœur de Pierre, Oreille de Belette et Truffe d’Écureuil. Le meneur paraissait perturbé et franchement agacé, nota Printemps Gelé. Même Cœur de Pierre, d’habitude si digne, paraissait offensé et battait de la queue avec frustration. Quant à Oreille de Belette, le matou qui était d’habitude si joyeux était silencieux, et suivait ses camarades, la queue basse.

Ne pouvant plus attendre davantage, Ciel Givré se leva et demanda aux arrivants :

« Alors, Étoile d’Or ? Que voulait-il ? »

Étoile d’Or poussa un soupir agacé et monta sur le rocher où les assemblées de clan avaient lieu. Il s’assit et sembla chercher ses mots durant un instant, puis il commença :

« Étoile de Roseau est en colère. Selon lui, plusieurs d’entre nous viennent la nuit sur leur territoire, enfreignant les frontières. Alors je n’ai qu’une question, soupira à nouveau le matou. Qui, ici présent, franchit délibérément les frontières du Clan de la Rivière ? »

Seul le vent lui apporta une réponse, puisque le camp resta silencieux, les guerriers se jetant des coups d’œil accusateurs entre eux. Finalement, Printemps Gelé se leva.

« Étoile d’Or. Tu sais bien que de notre côté aussi, nous avons des invasions, mais ce, sur presque maintenant tout notre territoire. Il se passe des choses dans les clans. Quoi, je n’en sait rien, mais c’est quelque chose de sombre, et si nous ne restons pas calmes face aux accusations des autres clans, tout ça va mal finir. »

Chapitre VII[]

« C’est impensable ! Le Clan du Vent qui enfreint nos frontières ? Et puis quoi encore ?! »

L’agitation du camp était palpable, devant l’indignation d’Étoile de Roseau. Le chef, d’habitude si calme et respectueux devenait sans arrêt irritable depuis que le Clan du Vent commettait des infractions à répétition sur le territoire du Clan de la Rivière. Nuage de Glace leva ses yeux bleus vers le meneur. Son comportement l’effrayait, à vrai dire. Le mâle brun tigré n’était plus le même qu’avant. Comme… dérangé, hanté par une force obscure et ténébreuse.

Nuage de Glace était devenue apprentie juste après la chute de Petit Néant. Petit Néant était resté chaton, dans la tanière des guérisseurs, avec Lune Rousse et Pelage de Pluie. Étoile de Roseau avait nommé Ombre d’Argent comme mentore pour Nuage de Glace, voyant que les deux femelles s’entendaient à merveille depuis si longtemps.

« Étoile de Roseau, calme-toi, miaula doucement Lune Rousse, agitant lentement sa queue rousse et touffue de droite à gauche. Qu’est ce qui nous dit que ce sont eux ? Étoile d’Or lui-même avait l’air étonné et offensé qu’on l’accuse d’une telle chose, et il ne jouerait pas la comédie. Je ne pense pas qu’Étoile d’Or ou ses guerriers soient responsables de ces infractions. Nous savons tous très bien que le Clan du Vent est dirigé par un meneur digne et respectable -tout autant que toi Étoile de Roseau, pour sûr-, il est alors impensable de douter sur leur innocence à propos de ces infractions, continua la femelle rousse, s’adressant cette fois à l’ensemble des guerriers présents dans le camp, qui écoutaient silencieusement la discussion depuis le début. Et j’ose vous rappeler qu’ Étoile d’Or nous a également accusé d’enfreindre les frontières. Selon lui, des guerriers de notre clan vont chaque jour chasser sur leur territoire. Mais tout comme eux, nous ne sommes par responsable de cela. »

Nuage Glace s’assit, la queue battante. Elle aurait tant aimé dénoncer Sens Vif et Cœur Noir mais… que valait sa parole, face à deux guerriers ? Lorsqu’elle et Petit Néant avaient vu les deux guerriers repus des proies chassées sur le territoire du Clan du Vent, rentrer au camp du Clan de la Rivière, cela remontait à déjà quatre jours. De l’autre côté du camp, face aux deux chatons, Sens Vif et Cœur Noir échangeaient des mots, dont le clan ne connaîtrai jamais la nature, en dehors de Nuage de Glace, qui avait une idée de leur identité. Pendant ce temps, Étoile de Roseau répondait à Lune Rousse avec frustration et colère, mais Nuage de Glace en avait suffisamment entendu. Elle se leva et tourna le dos au débat, se dirigeant vers son coin favori, où elle pouvait être tranquille sans rien entendre. Elle s’y allongea et posa sa tête sur ses pattes puis ferma les yeux. Tout le monde devient fou, ici. Mais ce ne sont pas nos seuls problèmes, ces infractions. Étoile de Roseau perd la tête. Voit-il la même chose que moi ?

Elle entrouvrit les yeux lorsque le tapis de feuilles mortes devant elle craqua. C’était Ombre d’Argent, qui la rejoignait. La guerrière blanche et Nuage de Glace étaient devenues très proches, au fur et à mesure que la petite femelle grandissait. Mais Nuage de Glace s’efforçait de s’éloigner de la femelle. Depuis que Petit Néant était tombé de l’arbre, elle ne l’avait pas vu sortir une fois de la tanière des guérisseurs. Depuis que Petit Néant était tombé de l’arbre… elle le voyait dans son sommeil. Elle le voyait mourir, tué par d’abominables créatures. Et chaque nuit, le rêve se réitérait, sauf que les créatures tuaient de plus en plus de personnes, maintenant Ombre d’Argent et Bourgeon d’Hiver en plus. C’est peut-être une vision. C’est à cause de moi qu’ils mourront. Je ne dois pas rester aussi proches d’eux qu’avant, ou ils mourront. Ce n’était évidemment pas facile de s’éloigner d’Ombre d’Argent, étant donné qu’elle était sa mentore. Mais Nuage de Glace tentait de ne pas rester proche de la guerrière e dehors de ses entraînements, et lorsqu’elle s’entraînait avec la femelle blanche, elle restait la plus silencieuse possible, souhaitant de toute son âme terminer la séance le plus tôt possible. Malgré cela, Nuage de Glace progressait vite, ce qui lui apportait une touche de satisfaction quotidienne.

« Nuage de Glace ? demanda la guerrière blanche en restant debout, près de la chatonne. Qu’est-ce qui ne va pas ? »

Nuage de Glace sentit son cœur battre jusque dans ses oreilles. Malgré sa grande affection pour Ombre d’Argent, elle ne pouvait rester avec la guerrière, ou cette dernière mourrait par sa faute. Contre toute sa volonté, elle inspira profondément et lui feula :

« Reste loin de moi ! Tout va très bien, et je ne veux personne pour me tenir compagnie ! »

Ombre d’Argent recula, les oreilles basses, attristée. Elle s’éloigna avec peine et Nuage de Glace sentit son cœur se serrer dans son poitrail. Elle détestait plus que tout rejeter l’aide de la femelle blanche, mais rester près d’elle et songer qu’elle pourrait mourir par sa faute lui était insupportable. Je ne peux pas continuer comme ça. Je vais finir par rejeter tout le monde, et quand j’aurais besoin d’aide, il n’y aura plus personne pour moi. Je vois déjà qu’Ombre d’Argent commence à briser nos liens d’amitiés de son côté aussi. Tout ça va mal finir.

Nuage de Glace se leva et retourna dans le camp. Le débat avait cessé, et les guerriers étaient retournés vaquer à leurs activités. Elle retourna dans la tanière des apprentis, où Nuage de Guépard et Nuage de Souffle discutaient avec agitation, à voix basse.

« T’es qu’un menteur, disait Nuage de Guépard avec l’air supérieur qu’elle affichait presque toujours. Le Clan des Étoiles, mauvais ? N’importe quoi.

- Je sais ce que je dis, siffla Nuage de Souffle, les dents serrées. Le Clan des Étoiles m’apparaît, mais il est juste composé de monstres. Finies les poussières d’étoile et la bonté d’âme, tout ça a laissé place à l’obscurité et aux lambeaux acérés des ténèbres. Au mal.

- Non, et tu es juste fou. Ou alors tu veux simplement faire ton intéressant et t’attirer les louanges des guerriers, rétorqua Nuage de Guépard, la queue battante. J’en ai marre, que tu cherche toujours à t’attirer les mérites de tous.

- Je ne cherche pas à… »

Nuage de Souffle soupira avec frustration.

« Oublie tout ce que je t’ai dit. Lorsque toi aussi tu verras la même chose, souviens-toi juste de quelle manière tu m’auras ignoré, feula le matou en tournant les talons pour sortir de la tanière des apprentis. »

Lorsqu’il vit Nuage de Glace, il cracha et lui lança un regard noir, avant de lui passer devant et de sortir. Nuage de Glace resta immobile un instant, jetant des regards rapides à Nuage de Guépard, puis elle finit par sortir à son tour. Elle aperçut la queue blanche de Nuage de Souffle disparaître par la sortie du camp et se dépêcha de sortir à son tour pour rattraper le mâle.

« Hé, Nuage de Souffle ! Nuage de Souffle, attend ! »

Nuage de Glace grogna de frustration, voyant que le matou ne s’arrêtait pas malgré ses appels, et accéléra pour le rattraper. Lorsqu’elle arriva à son niveau, Nuage de Souffle s’arrêta brusquement en se retournant et feula :

« Si toi aussi tu es venue me dire que je suis fou, sache que je le sais déjà et que c’est inutile !

- Non… Nuage de Souffle je… vois la même chose que toi. Enfin, je crois, miaula l’apprentie blanche d’une petite voix, intimidée par la colère du mâle, pendant que celui-ci commençait déjà à se retourner pour partir. »

Nuage de Souffle se stoppa dans son mouvement et se tourna vers Nuage de Glace, frissonnant.

« Tu… dis la vérité ? »

Nuage de Glace resta silencieuse avant de prononcer un simple mot, un seul :

« Oui. »

Chapitre VIII[]

Ciel Gris se rapprocha de Fleur du Marais, qui lâcha un ronronnement à l’évidence forcé, bien que Ciel Gris ne le releva pas, l’esprit occupé par les milliers de pensées qui tourbillonnaient depuis déjà trois levés de soleil dans sa tête. Les deux chats rentraient au camp après quelques instants de marche, espérant trouver Nuage d’Épine, ou bien juste une simple trace de l’apprenti, pouvant peut-être rassurer les proches de ce dernier. En effet, le tracas avait prit d’assaut les nerfs de la famille de Nuage d’Épine, malgré que leurs amis les rassurent du mieux qu’il le pouvaient, affirmant que le jeune mâle était toujours en vie -cela était par ailleurs très vraisemblable. Mais en réalité, personne n’avait idée de ce qui pourrait arriver à Nuage d’Épine, personne ne sachant où il se situait à présent.

De plus, la maladie était arrivée dans le camp du Clan de l’Ombre, plusieurs guerriers, apprentis, anciens étaient tombés malade, et Griffe Noire semblait impuissant face au virus. Il avait apparemment tenté maintes remèdes, mais aucun ne pouvait soigner les malades définitivement, bien qu’ils puissent soulager la douleur quelques instants.

« Tu penses qu’il est mort ? lâcha Ciel Gris, troublant le silence de la pinède. Nous sommes tous inquiets pour lui… il aurait pu rester non-loin du camp, voire au camp, inutile de partir loin... »

Fleur du Marais secoua la tête en gardant le silence.

« Où aurait-il pu trouver un abri alors ? demanda le guerrier gris. A mon avis, le Clan de la Rivière est bien loin d’être hospitalier, et même si le Clan du Tonnerre n’est qu’un ramassis de chats domestiques, ils ne souilleraient pas davantage leur sang-mêlé avec le notre -comme pourrait dire Pelage de Tigre, là-bas. »

Sa compagne ne répondit que par un haussement d’épaules, le regard vissé sur l’entrée du camp, qui apparaissait déjà au-dessus d’un petit buisson de houx.

« Ou alors peut-être qu’il a trouvé des Bipèdes pour s’occuper de lui ? demanda à nouveau Ciel Gris, la truffe froncée de dégoût à la mention des Bipèdes. Remarque, quand on n’a pas le choix j’imagine bien qu’on est content de trouver de quoi manger, surtout par cette saison, n’est-ce pas ?

La guerrière ne répondit à nouveau que par un haussement d’épaules, cependant sa démarche devint légèrement raide, comme agacée par les questionnements de son compagnon.

« Fleur du Marais ? Écoutes-tu une seule once de tout ce que je dit ? s’agaça à son tour Ciel Gris, agitant les oreilles de contrariété. Je pose des questions, je m’inquiète de la santé de l’un de nos camarades et tu te contentes d’ignorer mes questions. J’ai l’impression de parler à un rocher, vois-tu, se renfrogna-t-il.

- Si, j’écoute mais… je ne trouve simplement pas quoi répondre à tout cela, soupira Fleur du Marais, qui s’était arrêtée, les yeux baissés vers ses pattes.

- Quelque chose ne va pas ?

- Non ! Je… enfin non, tout va bien mais…

- Tu es malade ?

- Non ! Tout va…

- Quelqu’un te cause des ennuis ? Qui est-ce ? Quelque chose te...

- Non ! le coupa Fleur du Marais, cette fois réellement agacée. Tout va bien, je te dis, c’est juste que toute cette histoire m’a un peu tracassée et maintenant… j’essaie d’oublier. »

Puis la femelle tourna les talons et s’éloigna d’un pas vif pour regagner le camp. Ciel Gris poussa un soupir. Sa compagne avait le regard fuyant et l’attitude de quelqu’un en tord, il le voyait bien. Pourquoi leur complicité semblait s’effondrer de jour en jour ? Pourquoi Fleur du Marais l’évitait le plus possible ? Ciel Gris avait du insister, pour qu’elle vienne faire un tour rapide avec lui. Quelque chose ne se passe pas bien mais quoi ?… Je dois découvrir ce qu’il se passe.



Ciel Gris s’étira longuement. Il avait dormi plus longtemps qu’il ne le pensait ; le soleil était déjà presque à son zénith. Si personne ne m’a réveillé, l’on ne devait pas avoir besoin de moi. Il haussa les épaules puis se leva. Il sortit de la tanière des guerriers, l’esprit encore embrumé par ses songes de la nuit. Le guerrier gris s’étira longuement, les timides rayons du soleil hivernal caressant son pelage soyeux.

Un petit vent froid agitait doucement les branches chargées d’épines des pins, et il vint titiller les oreilles du matou. Ciel Gris agita les oreilles et s’ébroua, puis s’approcha du tas de gibier, en quête d’un met matinal afin d’assouvir sa faim. Il repéra un maigre écureuil, qui ne devait pas être de la veille. Je vais le prendre, ça évitera de laisser les pires proies aux anciens et reines. Alors qu’il enfonçait sa patte dans le tas afin de récupérer l’écureuil, une patte se posa sur la sienne, et des griffes s’enfoncèrent légèrement dans la fine peau du guerrier gris. Une goutte de liquide pourpre, encore chaud et palpitant, perla au bout des griffes.

« As-tu chassé quoi que ce soit aujourd’hui ? demanda une voix froide, dénuée de chaleur. »

Ciel Gris leva la tête. La voix appartenait d’évidence à Châtaigne Morte. La grande femelle brune fixait durement et froidement Ciel Gris.

« C’est que… non, répondit le matou gris, son échine parcourue d’un frisson qui redressa légèrement les poils de son dos. J’y serais bien allé, mais personne ne m’a réveillé alors…

- Je m’en fiche de savoir pourquoi, le coupa brusquement Châtaigne Morte en retirant sa patte de celle du guerrier. Tu n’as pas à prendre une proie dès maintenant, certains l’ont mérité mais pas toi, pour l’instant. »

Ciel Gris se redressa pour faire face à la guerrière.

« Eh bien alors ? Je m’apprêtais à prendre un écureuil, c’est un problème ?

- Alors personne ne t’as mit au courant du code, du nouveau code de ce clan ? »

Ciel Gris tenta de se remémorer ce qu’on lui avait dit la veille, mais jamais il n’avait entendu parler d’un code, pour sûr.

« Un nouveau code ? Enfin, c’est insensé, nous suivons le code du guerrier, le code de nos ancêtres, rétorqua-t-il.

- Le code du guerrier ? Il ne compte désormais plus, ici. Nos ancêtre nous ont oublié, lâcha Châtaigne Morte en crachant son dernier mot.

- Bien sûr que non… le Clan des Étoiles ne se résume pas à des apparitions et des prophéties pour manifester leur présence. S’ils ne disent rien, c’est que tout va pour le mieux… »

Griffe Noire, qui observait la discussion d’un œil distrait depuis son début, s’approcha. Le mâle blanc lâcha un rire amer.

« Pour le mieux ? répéta-t-il en se penchant sur Ciel Gris. Saisis-tu seulement le moindre chose de ce qui se passe ? Si nos ancêtres étaient encore là, penses-tu que la maladie serait encore dans ce camp ? Non, ils nous auraient –ils m’auraient– envoyé une vision pour nous aider à la contrer. Ne vois-tu pas qu’ils nous délaissent, nous abandonnent aux griffes du mal ? »

Ciel Gris resta silencieux. Que répondre à toutes ces accusations envers les ancêtres si respectables qui avaient bâtit les clans, trouvé des territoires pour les clans, calmé les sujets de discordes entre les chefs… rien, semblerait-il. Châtaigne Morte hocha de la tête et reprit :

« Si tu ne connais pas encore le code, sache que tu vas l’apprendre bien plus vite que tu ne le penses. Sache que tout guerrier n’ayant pas chassé au minimum deux proies ne peut se servir dans le tas de gibier. C’est la règle. »

La guerrière massive se retourna, laissant Ciel Gris hébété à côté du tas de gibier.

« Hé ! la héla-t-il en s’avança un peu vers la femelle, qui s’était arrêtée à son appel. Qui a inventés ces règles ? Qui est assez idiot pour ignorer le code du guerrier et le modifier à ses goûts et préférences ?

- Moi, gronda une voix ténébreuse de l’autre bout du camp. »

La voix sortait de la tanière d’Étoile de Faucon, et sans surprise, le matou qui sortit de l’ombre n’était autre que le meneur.

« Souhaites-tu remettre en question mon autorité et désobéir à mon code ? gronda à nouveau le mâle brun en s’avançant d’un pas lent et menaçant vers Ciel Gris.

- Non... Étoile de Faucon, répondit le guerrier. Non. »

Le chef lorgna le mâle gris avec un air de suffisance et de satisfaction.

« Bien. Dans ce cas, si tu souhaites manger quelque chose ce midi, je te conseille d’aller chasser. »


« Que tous ceux qui sont en âge de chasser s’approchent de moi pour une assemblée du clan ! »

Étoile de Faucon conviait la première assemblée de clan depuis que Nuage d’Épine était partit. Ciel Gris s’approcha de l’amas de guerriers qui s’était déjà formé devant le meneur. Ils discutaient avec bruit et agitation, et la tension présente dans le camp pulsait dans l’air. Étoile de Faucon leva la queue afin d’interrompre toutes les discussions, et le silence s’installa rapidement parmi les guerriers.

« Le Clan des Étoiles nous a abandonné. La maladie ravage nos âmes, nos cœurs, nous affaiblit peu à peu. Le Clan du Tonnerre et le Clan de la Rivière ne cessent de nous envahir. Car oui ; nous avons enfin la preuve que ce sont eux qui pénètrent notre territoire ! »

Un brouhaha de cris indignés et d’insultes jaillit à l’annonce de cette dernière phrase. A nouveau, Étoile de Faucon fit taire le camp d’un simple mouvement.

« Des guerriers du Clan du Tonnerre sont repérés chaque jour, aux alentours de nos frontières, alors qu’avant, lorsqu’ils ne venaient pas sur notre territoire, ils ne patrouillaient que tous les deux ou trois levés de soleil ! Hasard ? Je ne crois pas. Quant au Clan de la Rivière, il n’a jamais été hospitalier avec nous, notre simple présence sur le territoire des clans semble les horripiler !

- Ces faces de poissons ne se sont pas vus ! cria Cœur Brisé en se levant. Ils chassent le poisson que la même manière que les Bipèdes qui viennent chasser à la belle saison ; ils ne valent pas mieux que ces Bipèdes ! Hostiles, puants et dangereux. »

Sa déclaration fut accueillie par maintes approbations dans la foule de guerriers amassés au pied du tas de terre qui servait de promontoire lors des assemblées de clan. Étoile de Faucon fit un petit mouvement de tête approbateur en direction du jeune guerrier, et ce dernier bomba le poitrail, fier que son chef approuve son avis.

« Bientôt, l’assemblée aura lieu. Bientôt, tous regretteront leurs actes ! Le Clan de l’Ombre ne se laissera pas faire ! »

Étoile de Faucon sauta du tas de terre et les acclamations et cris des guerriers de l’Ombre résonnèrent dans le silence nocturne du territoire des clans.

Chapitre IX[]

« Pelage de Tigre et Patte de Feu, vous allez prendre le relai des sentinelles côté Clan de l’Ombre, miaula Matin Sauvage à l’adresse des deux matous. Patte de Feu, tu iras remplacer Fleur du Printemps et Pelage de Tigre, Patte de Velours. N’oubliez pas, vous ne patrouillez chacun que sur la moitié de la frontière, et pensez à vous poster à l’endroit stratégique une fois que vous aurez parcouru la moitié de la frontière. Faites les patrouilles à intervalles irrégulières, il ne faudrait pas que…

- Le Clan de l’Ombre commence à les repérer et puisse les contourner, oui, on sait, compléta Pelage de Tigre en levant les yeux au ciel. »

Le guerrier tigré n’avait jamais été très agréable avec les autres membres du clan, mais c’était un excellent guerrier, dont le Clan du Tonnerre avait plus que besoin durant cette période étrange. Patte de Feu hocha de la tête aux demandes de son lieutenant et se leva pour se diriger vers la sortie du camp, suivit de près par Pelage de Tigre.

« Ah, et Pelage de Tigre, tu pourras dire à Patte de Velours qu’il pourra se reposer un peu avant de commencer une séance d’entraînement avec Nuage de Flocon, ajouta Matin Sauvage. »

Pelage de Tigre se retourna et opina rapidement puis continua son chemin en direction de la frontière du Clan de l’Ombre. Matin Sauvage soupira. Il dormait peu, ces derniers temps, mais s’efforçait de continuer à paraître digne et sûr de lui. Il sursauta lorsque Bruyère Fleurie vint se frotta à lui. Il sourit du mieux qu’il le put, l’esprit embrumé par la fatigue. Bruyère Fleurie soupira à son tour.

« Regardes-toi, Matin Sauvage… depuis qu’Étoile de Nuage t’as demandé de t’occuper des sentinelles quotidiennes, tu ne dors presque plus et résultat, tu ne tiens plus debout, miaula sa compagne, une once de tristesse et de regret dans la voix. Personne ne peut ignorer ta façon de marcher, on dirait un cadavre qui se traîne hors de sa tombe… »

Matin Sauvage baissa les yeux. Il savait bien que s’occuper des sentinelles lui arrachait peu à peu son courage et sa force de continuer, mais il n’avait pas le choix. Il ne devait décevoir personne. Comme si elle avait lu dans ses pensées, Bruyère Fleurie miaula doucement :

« Cela ne sert à rien de tenter d’impressionner les autres si tu n’es pas en bonne santé… je vais aller dire à Étoile de Nuage que tu ne peux plus t’occuper des sentinelles pour l’instant. »

Ne pouvant lutter contre sa compagne, et même un peu reconnaissant de mettre fin à tout ça, Matin Sauvage se détourna pour se reposer. Il en avait bien besoin.

Matin Sauvage rouvrit les yeux dans une clairière. Elle paraissait vive et joyeuse, aux premiers abords, mais lorsque le matou esquissa quelques pas sans direction précise, les couleurs autour de lui devinrent rougeoyantes. Les nuages dans le ciel rougeâtre défilaient à une vitesse impressionnante. Le bois et les feuilles des arbres devinrent sombre pour l’un et mortes pour les autres. Les feuilles dégringolèrent de leurs arbres et, emportés par les rafales de vent qui agitaient avec rage tout ce qu’elles pouvaient agiter, s’envolèrent au loin. Le pelage de Matin Sauvage remuait furieusement, comme une rivière dont les flots sont tourmentés par le vent et la pluie d’un orage. Le lieutenant frissonna. Quelque chose, dans cet environnement, et particulièrement dans cette forêt, le dérangeait. Quoi, il n’en savait rien, mais quelque chose ne tournait pas rond.

Soudain, des formes apparurent devant lui. Des formes rougeoyantes elles aussi, avec des griffes et des crocs qui venaient tourmenter Matin Sauvage. Le matou tenta d’éviter les coups mais ils venaient de partout et nulle part à la fois. Du sang commença à lui couler lentement devant les yeux. Il secoua la tête, priant de se réveiller, implorant le Clan des Étoiles de le faire sortir de ce calvaire. Des échos, au début incompréhensibles mais de plus en plus clairs, bien qu’incomplets, parvinrent à ses oreilles. Leur volume s’intensifiait, si bien qu’ils finirent par devenir des hurlements perçants, emportés au loin par le vent qui soufflait avec puissance.

« Le Clan des Étoiles… dans les ténèbres… et la souffrance... le Mal... »

Le Mal…

REMERCIEMENTS[]

Tout d’abord, merci à tous mes lecteurs ! ;)

Ensuite, merci à la géniale série La Guerre des Clans, qui a beaucoup (vraiment beaucoup) inspiré tous les livres que j’ai écrit.

J’espère sincèrement que l’histoire vous plaît et que celle-ci vous plaira tout autant !

Votre avis compte !

N’hésitez pas à laisser des commentaires ci-dessous, votre avis m’aidera certainement à combler certaines failles dans ce livre. Si vous avez des questions au sujet de l’histoire, des personnages ou autre, n’hésitez pas ! Je suis tout à votre disposition pour vous répondre !

Encore un GRAND MERCI !

Signature FlammeDuFutur

Merci de me contacter au moindre problème dans la lecture ou dans la compréhension du texte. Si une phrase vous dérange dans cette histoire, ne l’enlevez pas de vous-même. Contactez-moi avant de faire quoi que ce soit. Si la phrase n’est pas nécessaire à la construction de la fanfiction, je l’enlèverais sans problèmes mais CONTACTEZ-MOI, s’il vous plaît.

  1. Eh ouiiiii ! Bien trouvé ! Il s'agit en effet d'une phrase faisant référence, que dis-je, une citation même ! venant du Roi Lion ! La phrase mytique de Scar à Simba a marqué les esprits, j'en suis sûre... :d
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