Wiki Vos histoires de LGDC
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Avant - propos : les mots de l’autrice[]

Cette histoire débute au territoire du Lac, dans le Clan du Tonnerre. Elle y raconte l’enfance d’Étoile Tigrée, une jeune chatte qui, durant son enfance, fut partagée entre guerrière et guérisseuse, un peu comme Feuille de Houx. Par ailleurs, elle est présente dans l’histoire de @Plumedelavand, l’auteure de : Les yeux de Nuage de Mirage, que je vous recommande très fortement ! Cette histoire ne sert pas juste qu’à faire déco et conter le récit de mon personnage. Elle sert aussi à comprendre comment Le Clan du Soleil a vu le jour et d’où vient Les yeux de Nuage de Mirage, bien que se soit expliqué en grosses lignes par Plume de Lavande. Ou peut-être devrais-je dire Brin de Lavande ?

Donc, déjà, il faut savoir comment le Clan du Soleil a vu le jour. Il est (réellement) né lorsque mes amis et moi avons eu l’idée de former un mini-Clan, plus si petit que ça, finalement. On s’est posé la question :" si on était des guerriers de LGDC, comment serions-nous, notre physique, notre grade,…?" Cela a donné le Clan du Soleil que vous connaissez peut-être déjà par Plume (ou Brin) de Lavande.

Note : Les chapitres sont plus au moins longs, sans nombres de lignes définis par chapitre.

Des modifs peuvent avoir lieu pour ajuster le texte suite à un texte trop long ou trop court.

N'hésitez pas à mettre un commentaire pour donner votre avis !

"- Apparemment je suis célèbre ?"

Désolée pour les personnages déjà morts qui apparaissent dans l'histoire ! (faute de ma part, j'en suis consciente...)

Prologue []

Mon histoire commence lors d’une nuit de demi-lune. Cette nuit-là, les guérisseurs s’étaient rendus à la Source de Lune. Au camp du Clan du Tonnerre, il n’y avait aucun chat pour aider ma mère, Pelage d’Étincelle, durant sa mise bas. Ce n’est que lorsque notre guérisseuse fut revenue que la reine rousse finissait péniblement son accouchement, sans aide. Cœur d'Aulne, surprise et inquiète, accourut. Elle nous vit alors, mes sœurs et moi, sans oublier ma mère. La chatte félicita la femelle rousse vif pour avoir mis bas sans aide - enfin, presque, car il y avait des reines aux alentours - et pour, bien sûr, l’arrivée des chatons. L’aurore, tel un félin, commençait à pointer son museau quand nous avons ouverts les yeux. J’ai regardé autour de moi : j’ai alors vu une grande chatte rousse aux yeux verts et une autre à côté d’elle. Plusieurs femelles regardait la scène, émerveillées. J’ai aussi vu deux petites formes à côté de moi, une blanche aux oreilles et au museau tacheté de noir et l’autre brune tachetée de roux et blanc. Parmi les femelles adultes, je scrutait de mes yeux vairons bleus et or laquelle pouvait être ma mère. Soudain, une force attira les deux petites chattes vers Pelage d’Étincelle et mon tour vint un instant plus tard. Je tentai de m’accrocher à la mousse; impossible : il n’y avait aucune prise. On m’attrapa par la peau du cou et je fut moi aussi attirée vers le ventre de la chatte au poil roux. Je devinai que c’était ma mère. L’autre, plus maigre, rompit le silence :

- Félicitations, Pelage d’Étincelle, comment vas-tu nommer tes chatons ?

- Je ne sais pas, avoua l’intéressée, Il me faudrait en parler avec mon compagnon, Chant de l’Alouette.

- Tiens, quand on parle du loup, soupira une des reines.

En effet, un matou noir aux yeux dorés arriva en trombe.

- Pelage d’Étincelle, qu… Oh ! Quels beaux chatons ! Mes chatons !, s’extasiaient-t-il avant de marquer une pause en regardant la guérisseuse.

- Tu peux entrer, lui assura-elle.

- Bonjour mes petits, murmura le matou.

- Ne sont-elles pas magnifiques ?, ronronna une chatte au ventre arrondi.

- À qui le dis-tu !, répondit le guerrier noir.

Pelage d’Étincelle ronronna. Évidemment, je ne savais ni parler, ni marcher, je ne pouvais ni même les comprendre. Ma mère prit la parole pendant que je remis à téter :

- Pour leurs noms, j’ai pensé à Petit Papillon, dit-elle en montrant la petite blanche. Ses yeux bleus m’y font penser.

Mon père approuva d’un hochement.

- La femelle tachetée est plutôt courte-sur-pattes, non ?, reprit Chant de l’Alouette, Pourquoi pas Petite Patte ?

- Mmmh…, hésita Pelage d’Étincelle, Ou alors Petite Lune, pour ses taches.

- Ça ferait trop spécial, pour un chat.

- Et pour la brune et blanche ?, demanda la même chatte au ventre arrondi.

- Eh bien…

- Pourquoi pas Petit Tigre ?, proposa la reine rousse.

- Cela indignerait les quatre clans, dont le nôtre. Le souvenir d’Étoile du Tigre est encore frais dans certaines mémoires., expliqua mon père en soupirant. Mais que dites-vous de faire du pareil au même ?

- Du quoi ?,fit la jeune maman, éberluée.

- Si on ne peut pas utiliser Petit Tigre, alors trouvons un nom quasiment pareil. Comme, hum… Petite Tigrure ?,miaula le mâle noir.

- J’aime bien, opina ma mère. Et va pour Petite Patte…

Chapitre 1[]

- Que tous ceux qui sont en âge de chasser s’approchent de La Corniche pour une Assemblée !

Pour une fois, il me sembla que l’appel de notre cheffe résonnait plus fort dans la combe que toutes les autres fois où je n’étais encore qu’un chaton. Aujourd’hui, c’est LE jour, songeai-je, je vais être apprentie ! J’ai tellement hâte de découvrir le territoire, de chasser, d’apprendre à me battre !

- Aujourd'hui, le Clan du Tonnerre accueille de nos nouveaux apprentis en son sein : Petite Patte, Petite Tigrure et Petit Papillon. Petit Papillon, toi qui souhaite devenir apprentie guérisseuse, je te l'accorde, tu seras donc l'apprentie de Cœur d'Aulne sous le nom de Nuage de Papillon et il fera ton baptême d'apprentie lors de la prochaine demi-lune à la Source de Lune, dit-elle.

Des acclamations fusèrent et je sentais ma sœur trembler de fierté. Pelage d’Étincelle ronronna et lissa mon pelage hérissé d’excitation. Je me suis empressée de me coller un peu plus à mes sœurs pour fuir l'étreinte de ma mère pendant que Petite Patte me lançait un regard malicieux. Tu verras, toi...pensai-je en la poussant vers la chatte rousse. Celle-ci attrapa ma sœur entre ses pattes et lissa son pelage à son tour. A présent, ce fut moi qui arborait le même regard espiègle que Petite Patte. Pendant ce temps, Étoile d’Écureuil reprit :

- Petite Patte, dès lors et jusqu'à ton baptême de guerrière, tu t'appellera Nuage de Lune, ton mentor sera Branche Fleurie. Enfin, Petite Tigrure, à partir d'aujourd'hui, tu te nommeras Nuage Tigré et ton mentor sera...

La chatte rousse marqua une courte pause, puis reprit :

- Ce sera Plume Tachetée.

La surprise et la joie se lut sur le visage de la femelle grise. Elle s'avança et me toucha le sommet du crâne avec sa truffe et je fis de même. Le mentor de Nuage de Lune l'imita. J'entendis de timides acclamations, puis un chœur de voix clamant nos nouveaux noms :

- Nuage de Papillon, Nuage de Lune, Nuage Tigré !

Mon nouveau mentor me dit d'aller manger avant de venir avec elle et les autres guerriers pour faire le tour du territoire ensemble. Je mangeai donc avec mes deux sœurs, puis rejoignit Plume Tachetée, Branche Fleurie, Nuage de Lune et Poil de Bruyère. Nous sommes partis juste après avoir mangé; je me sentais lourde comme une pierre. Pendant que nous patrouillions le long de la frontière du Clan de l'Ombre, j'appris à reconnaître leur odeur poisseuse sentant la mousse et la sève de pin. Puis, nous avons longé le Lac et je me suis arrêtée pour humer l'air. Une odeur de poisson mélangée à de l'eau fraîche m’envahit. Je fronçai la truffe pendant que Plume Tachetée m'expliqua :

- Ce que tu sens, près du Lac, c'est l'odeur du Clan de la Rivière. Essaie de la mémoriser et de te fabriquer une image de leur odeur.

L'image que ça me renvoie, c'est l'odeur pestilentielle des poissons. Trop bizarre. Cette odeur, je pourrai m'en souvenir toute ma vie tant elle est écœurante. , pensai-je en faisant justement la remarque à la chatte grise, qui ronronna. Bien plus tard, nous atteignîmes la rivière nous séparant du Clan du Vent. Une odeur de lapin et de bruyère me parvint lorsque je reniflais l'air. Comme me l'avais enseigné la femelle grise, j'essayai de la mémoriser en me faisant une image de leur odeur.

* de retour au camp : *

Je fonçai vers le camp, cherchant du regard ma mère. Je la trouvai près de la réserve de gibier, mangeant une musaraigne en compagnie de Chant de l'Alouette. Nuage de Lune avions eu la même idée car elle me dépassa et raconta à nos parents tout ce qu'on avait appris aujourd'hui. Je me joignit à leur conversation pendant que la chatte écaille continuait :

- Et là, on est allés au Lac, et je crois avoir vu Nuage Tigré se retenir de vomir en sentant l'odeur du Clan de la Rivière.

- Eh, arrête de parler, espèce de corbeau croassant !, miaulai-je en sentant mes joues chauffer sous mon pelage tigré.

Nuage de Lune pouffa et Pelage d’Étincelle ronronna. Chant de l'Alouette m'assura que lui aussi avait failli vomir lors de sa première patrouille. Je fut néanmoins pas pour le moins calmée. Je savais que Nuage de Lune ne raterait pas une occasion de se moquer de moi ou quelconque autre personne, pourvu qu'on lui jette ce regard qu'elle demandait tant à obtenir. Vous savez cette pensée qui vous tourmente jusqu'à vengeance : Tu me le paieras, je t'aurais, un jour. Le crépuscule était déjà là quand nous étions arrivés au camp. Mon ventre grondait famine. J'ai pris un rongeur présent dans le tas de gibier pendant que mes parents étaient distraits par l'homologue de ma sœur. Ils vont finir par s'endormir., songeai-je, mais tant mieux, Chant de l'Alouette a passé la journée à chasser pour remplir la réserve de gibier. Je mangeai tranquillement, écoutant d'une oreille distraite l'apprentie écaille.

Chapitre 2 []

Le soleil entra dans la tanière des apprentis par un petit trou dans la voûte épineuse, projetant des fuseaux de lumières au sol. Doucement, je me réveillai, les yeux mi-clos. J'entendis miauler Nuage de Lune :

- Tu comptes dormir jusqu'à quand, espèce de loir ?

- J'arrive !

Je me fis une toilette rapide, chassant de la mousse collée à mon pelage et sortis en me dirigeant vers ma sœur, qui alla rejoindre les guerriers pour la patrouille du matin. Plume Tachetée, Branche Fleurie, Nuage de Lune, Pluie de Pétales et Cœur d’Épines la constituait. Cette fois-ci, nous apprîmes à chasser, mais j'eus moins de chance que Nuage de Lune, qui peinait à rapporter un énorme écureuil. Non, moi, j'avais chassé une petite souris et une musaraigne. Plume Tachetée, voyant que je ronchonnais à cause de mes petites prises, me dit :

- C'est très bien, pour un début, Nuage Tigré. Avec le temps et l'expérience, tu pourras même attraper des proies plus dodues que l'écureuil qu'a ramené Nuage de Lune.

- Mais Nuage de Lune a attrapé une proie plus grosse qu'elle, et c'est la première fois qu'elle chasse !, gémis-je.

- Eh bien, elle a eu plus de chance que toi, c'est tout, répondit la chatte grise en posant son museau sur le sommet de ma tête.

Encore bougon, j'allai déposer mes minces prises dans le tas de gibier et félicitai l'apprentie écaille dont les yeux verts luisaient de fierté. Je pris un merle dodu pour les anciens et allai le déposer sous les racines du noisetier. Après ça, je m'approchai de la réserve remplies de proies et choisis une petite grive. Je cherchais du regard un endroit calme pour manger, quand je vis Nuage de Papillon sortir de la tanière de la guérisseuse. Elle alla prendre une grosse souris sur le tas et s'installa à l'ombre, sous la corniche. J'allai me joindre à la chatte blanche.

- Salut, ça faisait longtemps., dis-je d'une voix que je pensais détachée.

- Salut. Désolée, j'ai été prise ces derniers jours car Patte de Mulot se plaignait de douleurs au ventre., ronronna-elle en attaquant son repas, Cœur d'Aulne m'a appris à soigner les blessures, les maux de tête, mais pas de ventre. Et comme c'était un cas grave, je n'ai pas pu l'aider juste lui rapporter des remèdes.

- Waouh, ça à l'air... ennuyeux et dégoûtant, pensai-je ... très intéressant., répondis-je finalement.

- Oui, ça l'est !, s'écria, je suis vraiment hyper contente d'avoir Cœur d'Aulne comme mentor !, s'écria Nuage de Papillon avant de reprendre,... Mais, dis-moi, tu ne devrais pas être avec Nuage de Lune et les autres apprentis guerriers ? Vous vous êtes fâchées ?

- Disons que... J'ai eu ma dose de Nuage de Lune, dernièrement., grognai-je en montrant du museau la petite femelle tachetée dévorant son énorme prise.

- Ah... Oui, je vois., pouffa ma sœur.

Irritée, je rétorquai :

- Oh, commence pas à rire, toi aussi !

* Plus tard dans la soirée *

- Viens, Nuage Tigré. Allons nous entraîner à nous battre dans la combe mousseuse, me sonna mon mentor, Nous nous entraîneront, comme tu le sais, avec Nuage de Lune.

Je vais pouvoir avoir ma vengeance., me réjouis-je intérieurement.

- Mais attention, reprit la chatte grise comme si elle pouvait voir mes pensées, pas la peine de s'acharner sur elle pour se venger, elle n'y est pour rien si elle a attrapé une meilleure proie que toi.

- Tu n'es pas drôle, ronchonnai-je.

Nous nous sommes regroupés une minute plus tard, avons traversé une partie de la forêt avant d'atteindre la combe. Plume Tachetée m'apprit quelques positions défensives et Branche Fleurie entraîna Nuage de Lune aux postures attaquantes. Nous fîmes un petit entraînement entres apprenties, puis les rôles s'inversèrent et ce fut moi l'attaquante et Nuage de Lune prit les postures défensives. Le miaulement de Branche Fleurie annonça la fin de l'entraînement. La nuit commençait à tomber.

- Félicitations, ronronna mon mentor, tu te débrouilles bien en combat, apparemment.

Je jetai un coup d’œil à Nuage de Lune, qui haletait, couchée dans un coin mousseux. Je vins la voir en lui miaulant :

- Ça va ? Pas trop fatiguée ?

- Ouais... Ouais, ça va., lâcha-elle, Par le Clan des Étoiles, tu m'as fais mal aux côtes !

- Ça va, tu pourras aller voir Nuage de Papillon, comme ça.

- Non, c'est le métier qui rentre., grommela-t-elle en grimaçant, Tu es forte en combat, malgré tout. Peut-être pas en chasse, mais on ne peut pas être parfait.

Nous rentrâmes tard; tout le monde mangeait déjà. Nous fîmes notre toilette, allâmes manger avec le reste du Clan et, après avoir dégusté notre repas, Nuage de Lune et moi gagnâmes notre tanière pour dormir. Tandis que je baillai à m'en décrocher la mâchoire, ma sœur me fit un bref "bonne nuit" et se roula en boule, épuisée. Je fis de même en songeant à ce que m'avais dit la chatte écaille. Le pensait-elle vraiment ? Pense-elle que j'ai l'étoffe d'une guerrière ? Perdue, je réalisai que je n'étais finalement pas à l'aise à la chasse et au combat même si je me débrouillais. Que je n'étais pas comme eux, pas faite pour la chasse et la guerre. Peu à peu, le sommeil m'emportai.

Chapitre 3 []

Encore une fois, je me réveillai par de doux rayons de soleil. Quelques lunes étaient passées, et j'avais pris ma décision. De bonne heure, comme à mon habitude, je me levai. Nuage de Lune me regarda d'un air intrigué, presque blasé. J'escaladai la Corniche sous les yeux étonnés de mes camarades. Je m'arrêtai devant la grotte qui séparait le camp de la tanière de notre cheffe, Étoile d’Écureuil. Feuille de Lis sortait justement d'un rapport concernant sûrement une patrouille du matin. Elle sortit, me vit, re-rentra dans la tanière. J'entendis un bref soupir, puis Feuille de Lis ressortit, toujours en me regardant. J'entrai dans la tanière de la chatte rousse. Ses yeux verts luisaient dans l'obscurité.

- Que me vaut l'honneur de ta visite ?, manda-t-elle.

Je déglutit en frissonnant un peu. Je n'avais jamais osé pénétrer dans la tanière de notre cheffe auparavant.

- Je... Je suis venue vous... demander une faveur., bégayai-je.

- Quelle faveur ?, fit ma cheffe en haussant un sourcil.

- J-je souhaite devenir apprentie guérisseuse.

Feuille de Lis me fixa, ébahie. La chatte tigrée se retourna vers Étoile d’Écureuil :

- C'est possible ?

La femelle rousse feu marqua un temps d'arrêt. Je stressai qu'elle refuse, mais elle reprit :

- Oui, c'est... c'est déjà arrivé. Puisque telle est ton souhait, je te l'accorde. Feuille de Lis, va prévenir Aile de Papillon. Elle doit avant tout donner son accord.

La lieutenante s'éclipsa, puis revint un instant plus tard avec la jeune chatte blanche. La pauvre avait encore l'âge d'être apprentie. Malheureusement, son mentor était morte lors d'une horrible mauvaise saison épidémique. D'autant plus, elle n'avais pas fini son apprentissage; la mort prématurée de Cœur d'Aulne n'arrangeai rien. Je l'avais beaucoup aidé durant cette période, c'est cela qui m'a convaincue. L'odeur des herbes et des baies n'avaient rien à voir avec celle que j'eus flairé dans les bois.

- Nuage Tigré est mon apprentie, dit-elle d'une voix lasse, lointaine, distraite.

- Oui !, m'écriai-je.

- Doucement, miaula la femelle rousse tapie dans la grotte, Aile de Papillon, acceptes-tu de prendre Nuage Tigré, ta sœur, comme apprentie ?

- Oui, bien sûr., assura la jeune guérisseuse.

Je voyais bien que quelque chose clochait, tout le monde le voyait d'après les battements de queue de ma cheffe et le regard que jetait Feuille de Lis à ma sœur. Regard qui voulait clairement dire : Mais qu'est-ce qui se passe chez cette cervelle de souris de chatte ? Je crois que je lui aurait arraché les moustaches une à une si Étoile d’Écureuil n'aurait pas été là.

- Bien. Nuage Tigré, promets-tu de respecter la voie de la guérisseuse, sachant tout ce que cela implique ?

- Oui, confirmai-je en opinant du chef.

- Alors tu est désormais l'apprentie d'Aile de Papillon.

- Je vais chercher Plume Tachetée pour lui annoncer la nouvelle., décida Feuille de Lis en fixant du coin de l’œil ma sœur.

Je marchai donc vers la tanière de la guérisseuse avec mon nouveau mentor. Tout le chemin menant à la tanière se fit en silence complet.

***

Arrivées dans l'antre, Aile de Papillon s'assit :

- Bien, à présent... elle réfléchit, Que connais-tu comme remèdes, je n'aurai pas à t'apprendre ce que tu sais déjà, mais j'aurai peut-être à en dire un peu plus sur eux.

- Eh bien, commençai-je, je sais que les toiles d'araignées arrêtent les saignements et évitent les infections.

-Donc, ils servent à... m'encouragea la chatte blanche d'un ton monotone.

- A garder la blessure propre ?

- C'est tout à fait ça, s'exclama la femelle, comme revenue à elle.

- Et je connais aussi la bourrache et le genièvre. La bourrache, calme la fièvre et favorise l'arrivée du lait. la genièvre soigne tous les maux, qu'ils soient de tête ou de ventre, ou autre chose.

Ma sœur me regarda, étonnée, avec ses grands yeux bleus scintillants. Elle reprit :

- Comment sais-tu ça ?

- J'ai entendu Cœur d'Aulne et Pelage d’Étincelle discuter de ça, un jour.

- Ah, Cœur d’Aulne, c'... c'était vraiment un bon mentor... C'est tout ?

- Oui...? Je crois.

- Un bon début, argumenta-elle en se tordant les griffes, Tu feras une bonne guérisseuse avec de l'expérience et de l'entraînement. C'est rare que quelqu'un retienne la bourrache et le genièvre du premier coup.

Un ronronnement monta de ma gorge, mais je me retins. Je redoutais qu'elle dise ça pour me faire plaisir mais qu'elle ne le pensait pas. En fait, depuis sa première demie-lune, elle avait l'air effacée. Pendant toute la journée, j'appris à soigner donc la fièvre, vu que je connaissais déjà ça. Me voyant fatiguée, ma nouvelle mentor me souffla :

- Bon, assez travaillé pour aujourd'hui. Va manger. Tache de retenir ce que tu as appris : je testerai ta mémoire ! Demain, nous soignerons les égratignures non-infectées.

Je la remerciai d'un signe de tête. Je franchis le rideau de ronces masquant le camp. Là-bas, une patrouille rentrait. Des chats rapportaient des proies aux anciens et aux reines. Je vis Nuage de Lune manger seule sous la Corniche. Je la rejoignais en prenant une proie. Lorsqu'elle me vis, elle dressa la tête, souriante. Arrête de sourire juste deux secondes, tu m'éblouis., pensai-je, Comment peux-tu chasser et avoir le sourire ?! C'est pas normal.

- Alors, ça c'est passé comment, Miss Guerriérisseuse ? Tu t'es pas endormis ?, pouffa-elle.

- Arrête, fis-je en ronronnant. Je ne suis qu'une sage et douce apprentie guérisseuse, maintenant.

- La Sage et Douce Nuage Tigré, on m'l'avait jamais faite, celle-là ! s’esclaffa Nuage de Lune.

- Ô Clan des Étoiles, me serai-je, par le plus grand malheur, transformée en... AILE DE PAPILLON !!!

Nous nous regardâmes, puis nous rîmes. Nous considérions notre sœur comme l'aînée (même si elle ne l'était pas) : elle était sage, juste et calme, surtout. Tout le contraire de l'apprentie écaille : drôle, souriante, blagueuse, qui se faisait souvent remarquer par sa bêtise. Moi ? Eh bien, mise à part mes griffes de la taille du Lac, bon... Je suis un juste milieu entre mes deux sœurs. L'équilibre. Chant de l'Alouette, mon père, aimait m'appeler Tigre-Vairons. Je sais pas si c'est gentil.

Chapitre 4 []

L'aube se leva. Mes oreilles frétillèrent. Six lunes étaient passées et j'avais reçu mon nom de guérisseuse, Feuille Tigrée. Ma sœur était guerrière sous le nom de Petite Lune. Je n'arrêtais pas de lui dire que c'était un nom de chaton, mais elle s'en fichait. J'entendis Feuille de Lis miauler le nom des patrouilleurs. Les anciens se réveillaient, grognants. Je m'étirai et filai réveiller mon apprentie, Nuage de Miel. Elle progressait vite. Tout allait bien jusqu'à ce que des chatons entrèrent et renversèrent des plantes soigneusement empilé. Je mis les remèdes hors de portée de leurs pattes et leur gronda doucement :

- Faites attention où vous jouez ! Vous avez écrasé mes plantes !

Les trois petits baissèrent la tête piteusement. Je repris :

- Bon, ça ira pour cette fois. Ne revenez plus nous embêter.

- Mais on s'ennuie, au camp ! s'écria l'un d'eux.

- Allez plutôt demander aux anciens de vous conter une histoire. Vous savez, avant le Grand Périple, il y avait un tyran nommé ÉTOILE DU TIGRE. Allez leur dire, fis-je, contente.

- Ils vont être traumatisés, pouffa Nuage de Miel.

- Ils m'embêteront plus vu la taille de mes griffes: j'ai les mêmes que lui. Ils vont s'imaginer des choses.

Pendant que je rangeait les herbes, la chatte dorée-orange partit, puis revint, des feuilles dans la gueule. Elle déposa le ballot et miaula :

- Hier, j'ai remarqué que notre stock d'herbe à chat était bas.

- C'est tout ce qu'il reste ? demandai-je en voyant le petit tas fané.

- Oui, comme tu sais, la mauvaise saison nous a drainé notre réserve, se lamenta la femelle tachée de noir.

Je me souvins alors que, la mauvaise saison, le Clan du Tonnerre fut la proie d'une épidémie sans précédent. Petite Lune avait faillit mourir, comme nombreux chats. Une reine avait perdu sa portée à cause de ça. Un dur épisode de crise pour sa novice.

- Bien, mets-les là, Nuage de Miel.

Elle opina en les posant dans la fissure. Elle fera une redoutable guérisseuse, me dis-je en repensant à Aile de Papillon, avec du temps et de l'entraînement.

Je me laissai rêver, imaginant la chatte soignant seule des guerriers.

- Youhou, Feuille Tigrée !

- Mmm... Oui ? soufflai-je, à demi-revenue à la réalité.

- Oh, tu ne m'as pas entendue, je disais "Réveille-toi, cervelle de souris de mentor !", ronronna la femelle en prenant la voix de Petite Lune.

- Comment OSES-TU ?! m'écriai-je, faussement indignée. C'est pas bien d'imiter ses semblables. *Baissant la voix, j'ajoutai* : Même si c'est très bien fait.

Nuage de Miel ronronna bruyamment.

- Bon, vas-y, pose ta question.

- Eh bien... C'est la demie-lune, non ? Cela va t'étonner, mais... je n'ai pas trop envie d'aller à le Source de Lune, confessa-elle.

- Je sais, répondis-je simplement. Pour tout avouer, ça ne m'enchante pas. Nous n'avons rien reçu depuis des lunes, Aile de Papillon et moi.

J'eus un haut-le-cœur rien qu'à l'évocation de son nom. Mon ventre se noua. Cela faisait de la peine à Nuage de Miel de voir son mentor ainsi.

Chapitre 5 []

Cela faisait six lunes qu'Aile de Papillon avait disparut, ne laissant aucune trace. Nuage de Miel ne l'avait vue que quelques fois, trop jeune pour s'en souvenir. Mais, moi, je m'en souvenait très bien. J'avais la gorge nouée rien qu'en pensant au jour de sa disparition. Je nous revoyais, ma sœur et moi, dans l'antre. Aile de Papillon était toujours en deuil de son mentor. Du moins, c'est ce que je croyais, avant de savoir la vérité, des lunes plus tard cet instant. Brisant le silence glacial, elle avait murmuré :

- Feuille Tigrée, je vois qu'il ne reste plus de bourrache, je vais aller en chercher...

- D'accord.

Ma sœur sortit, étrangement mal à l'aise. Peut-être qu'elle ne s'est toujours pas remise de la mort de Cœur d'Aulne ? Elle n'est pas encore habituée à être guérisseuse à sa place et avoir déjà une apprentie..., avais-je. songé

Le temps passa, mais Aile de Papillon n'était toujours pas revenue. Une nuit, à l'Assemblée, le Clan de l'Ombre déclara la disparition de leur guérisseur, Brin-d'Osier, et accusa les autres Clans de l'avoir enlevé, voire tué. Typique du Clan de l'Ombre. Le ton monta et la lune faillit se voiler... Le Clan du Tonnerre annonça aussi la volatilisation de ma sœur. Le matou brun et crème se serait absenté le même jour que notre guérisseuse et depuis... aucune nouvelle. La pluie avait effacé leur trace comme leur leur existence entière. Les nouvelles générations ne se souviendront même plus de leurs noms. Mon dernier souvenir fut celui d'un faible sourire sur une mine peinée, presque... à contrecœur. Ce visage attristé, mélange de nostalgie, de compassion et de tristesse. Serait-ce du désespoir que j'avais vu là ? Non, bien sûr que non... elle était heureuse ici, non ? ou alors... c'est pour autre chose...

Chapitre 6[]

Je me retrouvai dans mon antre, à l'endroit même où j'étais il y a six lunes. Je m'affairais visiblement à la même chose, mais, bizarrement, quelque chose m'avait arrêtée. Perturbée par le petit tas devant moi, je les triai et les remis dans la fissure où je rangeais mes herbes. Non loin, le goutte-à-goutte du bassin d'eau m'attira. En buvant, je vis que je semblais avoir pleuré. Je plongeai mon visage dans l'eau, m'ébrouai et entrepris de faire pensivement ma toilette. Combien de jours s'étaient écoulés ? Et où était Aile de Papillon ? Partie chercher des herbes, sûrement, pensai-je. A ce moment, mes yeux vairons aperçurent une fente dans le plafond de ma tanière. Je murmurai :

- Il faut boucher ce trou; s'il pleut, nous serons trempées. Je le dirai à Aile de Papillon, quand elle reviendra.

Tout à coup, je remarquai que la lune était à demie pleine.

- Crotte de souris ! grognai-je en sortant de la tanière. C'est l'heure. Aile de Papillon ?!

Où est-elle ???, m'écriai-je dans ma tête.

Juste à côté de l'antre, je m'aperçus qu'une petite chatte dorée-rousse tachetée me regardait.

- Que... qui... quoi ? bredouillai-je, affolée.

- Feuille Tigrée, ça va mieux ? la questionna l'apprentie, Ça n'avait pas l'air d'aller, alors je t'ai laissée seule, un peu...

Je repris mes souvenirs : la disparition d'Aile de Papillon; le baptême de Nuage de Miel, la mauvaise saison dévastatrice... que j'ai appris à détester particulièrement.

- Oh, oui... Oui, ça va. J'ai crus que... oui, enfin non, je veux dire : c'est bon, ça va.

- D'accord...? hésita la rouquine en gloussant.

Soulagée, cette dernière voyait revivre son mentor. Néanmoins, Feuille Tigrée avait balbutié ces phrases précipitamment. Pour changer de sujet, je dis:

- Allez, viens, les autres doivent nous attendre !

Nous empruntâmes le tunnel de pierre et la barrière de ronce obstruant l'entrée du camp. Sur le chemin, nous croisâmes une patrouille de nuit rentrant au camp. Parmi les guerriers, je reconnus Petite Lune. Elle me lança un regard malicieux en miaulant :

- C'est un peu tard pour une balade, non ?

- Il n'est jamais trop tard ! Tu sais, une certaine plante se récolte la nuit, plaisantai-je.

- Je hai hamé conhri..., lui avoua sa sœur en reprenant sa prise dans la gueule.

- Oui, moi non plus, je ne t'ai jamais compris avec une proie entre tes crocs.

- Pffff... J’ te la garde ! Tu as toujours faim en rentrant.

- Merci, lui soufflai-je.

- Feuille Tigrée ! s'écria Nuage de Miel, C'est pour aujourd'hui ou pour demain, la demie-lune ?!

- J'arrive !

Nous reprîmes la route. Quand nous arrivâmes enfin au ruisseau nous séparant du Clan du Vent, tous les guérisseurs nous attendaient.

- C'est pas trop tôt ! s'esclaffa Plume de Crécerelle, le guérisseur du Clan du Vent.

- Du calme, nous sommes là, pas la peine de s'arracher la fourrure. Nous avons été retardées, rétorquai-je.

- Retardées ? grogna Flaque Brillante, mi-énervé, mi-étonné.

En effet, tous les félins se posaient ces mêmes questions : pourquoi les guérisseuses avaient été retardées ? Le Clan du Tonnerre souffrait-il encore de la dernière mauvaise saison ? Est-il plus faible maintenant ? Pendant ce temps, je pensai : Pour la première fois, je suis en retard et je dois absolument être irréprochable alors que d'autre ne le sont pas ? *[1] Les chats avançaient vers la Source de Lune. Je songeai au Clan des Étoiles, ce dernier n'avait pas envoyé d'Augure depuis des lunes. Enfin un ère de paix ? Quand nous nous installâmes chacun à nos places, tous s'abreuvèrent de l'eau de la Source. Pour une fois, je sentis le pelage de mon apprentie contre le mien. Puis, le sommeil me gagna.

Chapitre 7[]

Lorsque je me réveillai, je me retrouvai dans une clairière, éblouie par le soleil de plomb. Je remarquai que j'étais dans un camp, comme au Clan du Tonnerre. Sauf que... C'était désert. Bizarre. Il y avait un vieux chêne et, plus loin, on apercevait un buisson d'aubépine, calés contre un mur en arc de cercle comportant un trou au sol large de 3 queues. Ce mur se continuait sur la droite vers un énorme roc semblable au Promontoire, du temps d'avant le Grand Périple. Un roncier poussait juste dessous. Non loin, un autre était planté contre la paroi, qui se détruisait à partir du minéral. Juste après, une barrière de ronce venait combler les vestiges de la carrière. Je fis à peine quelques pas que le ciel se mit à tourbillonner. Le décor changea. Ce camp se transforma en scène d'horreur. La barrière piétinée, les ronciers arrachés et des traces de griffes et de sang marquaient la paroi. Le sable de la carrière était devenu rouge, tout retourné par des empreintes de lutte. Le chêne aussi portait des griffures. Soudain, des hurlements déchirants surgirent, rendant l'atmosphère terrifiante. Un chœur de cris à en glacer le sang suivirent le premier. Mon corps ne me répondait plus; j'étais figée sur place. A nouveau, le décor changea. Cette sensation était désagréable, comme si le paysage tournait telle une toupie. Encore une fois, je vis un paisible endroit. Une combe sablonneuse entourée de petits rochers..., pensai-je. Le vent ébouriffa ma fourrure. Le ciel changea encore, la combe se tacha de rouge, le sable retourné, griffes, sang, feu, crocs... Des milliers d'images défilèrent devant mes yeux. Des pas lourds écarlates, des hurlements déchirants, des griffes, des éclaboussures de sang, mais aussi... La lune. Rouge sang, ronde, pleine. Où était donc le Clan des Étoiles pour aider ces pauvres chats ?

Soudain, la pénombre m'emporta. Seule, dans le noir, et incapable de bouger. Puis, je me réveillais dans l'humidité de la Source de Lune. Ma vue était floue. Je vis Plume de Crécerelle faisant sa toilette, Papillon ayant l'air d'avoir bien dormi et Nuage de Miel se levant. Mes muscles tremblants, j'essayai de me relever. Nous partîmes au petit matin. Quand nous furent rentrées au camp du Clan du Tonnerre, nous nous affalâmes sur nos nids et je sentis une petite masse contre mon dos... Si douce, si molle, si petite... Oh, non, ça ne peut pas être un chaton ! Je bondis hors de ma litière et remarquai la souris que Petite Lune m'avait apporté la veille. Mon ventre grogna, alors Nuage de Miel et moi partagèrent la proie avec appétit. L'apprentie s'en alla vers la fissure pour trier des herbes séchées. Elle les reposa dans le trou, triées, sous ma surveillance. Après une séance d'entraînement sur les méthodes pour soigner le mal vert, blanc et noir, Plume Tachetée vint nous voir :

- Feu..., toussota la guerrière, ... ille Tigrée... j'ai mal à... (tousse)... la gorge.

Nuage de Miel me consulta du regard. Je hochai la tête, ironiquement, l'air de dire : Très bien, que vas-tu faire, maintenant ?! Son visage rayonna et elle s'exclama :

- Bien, Plume Tachetée, assieds-toi là, je vais te chercher ce qu'il faut.

- Et qu'est-ce qu'il faut ? demandai-je à la jeune chatte tachetée de noir.

- Eh bien... des baies de genièvre... Et elle a de la toux, alors il lui faudra aussi de la bourrache ou de la lavande, récita l’intéressée.

- Préconise la bourrache, il en pousse un peu partout. Sans-faute !

Mon apprentie ronronna et alla chercher des plantes à la réserve. Seule à seule avec mon ancienne mentor, je lui dis :

- Plume Tachetée, tu sais que... Tu as toujours été une très bonne guerrière et j'ai adoré être ton apprentie...

- Oui, je sais... soupira la femelle grise.

- Alors pourquoi refuses-tu de me parler ? rétorquai-je.

- Parce-que... avoua la féline, je ne sais pas, j'ai l'impression d'avoir failli à ma mission de mentor.

- Ce n'est pas vrai ! m'exclamai-je, tu es exceptionnelle !

Plume Tachetée me sourit, juste avant d'avoir une nouvelle quinte de toux. Nuage de Miel revint, un ballot d'herbes dans la gueule. La femelle grise tachetée mastiqua un peu, puis replia ses pattes sous son ventre.

- Ton apprentie fait beaucoup de progrès, surtout depuis l'épisode du mal vert, déclara-t-elle pour changer de sujet.

- Oh, euh, merci, bégaya cette dernière, mais en fait, je me prépare à toute éventualité... Et puis, j'ai une bonne mentor, alors c'est plus facile...

Oh, mais quelle cervelle de souris ! songeai-je, honteuse. Plume Tachetée me lança un regard amusé.

- Je suis sûre que tu deviendras aussi performante qu'elle. Merci beaucoup, ça va déjà mieux. Et puis, j'ai une patrouille de chasse à mener.

Elle sortit de la tanière. Nuage de Miel était excitée car la chatte grise l'avait complimentée. Je lui ordonnai plutôt d'aller chercher de l'herbe à chat que de se vanter ses progrès. Elle repartit donc, l'air boudeur. Encore plus fatiguée que la veille, je baillai en pensant à l'affreuse vision. Je ne savais que faire. Avec des pas hésitants, je sortis de l'antre. Le soleil coulait à flots, tout semblait paisible... Comme dans ma vision... Non, arrête de penser à ça. Je vis Petite Lune en train de se détendre après une dure partie de chasse sous le soleil cuisant. J'hésitai à aller la voir pour lui parler de ma vision. Ah, mais que pourrait-elle me dire ? Sérieusement, je doute qu'elle pourrai m'aider... J'inspirai un grand coup.

- Ok. Ça va aller. Tu n'es pas folle, Petite Lune va sûrement comprendre ma situation, dis-je à voix basse pour moi-même. Oui, c'est sûr. Enfin, presque sûr, à moitié.

Les pattes tremblantes, j'avançai tant bien que mal vers le coin ombragé où était affalée la guerrière écaille. Elle se retourna, les poils hérissés, puis se détendit quand elle me vit arriver.

- Oh... c'est toi. J'ai cru que c'était encore Feuille de Lis venue me proposer d'intégrer la patrouille de chasse, grogna-t-elle. Je lui aurai arraché les moustaches si elle aurait été venue, j't'assures !

- Ah.. Tu, tu dois être... fatiguée, je suppose. Tu as besoin que... enfin, que je te... laisse seule ? balbutiai-je.

Qu'est-ce qu'il se passe, je n'arrive pas à aligner deux mots d'affilée ! Petite Lune renifla en m'examinant avec des yeux calculateurs, puis finalement ignora ma demande en ordonnant sèchement :

- Crache le morceau, il s'est passé quoi ? C'est en rapport avec une nouvelle vision du Clan des Étoiles ? Ou alors... Non, mise à part ça, je vois pas... Ah ! Mais oui ! C'est... Aile de Papillon ???

Je frissonnai rien que d'entendre ce nom prononcé par cette personne avec ce ton. Ma sœur avait murmuré son nom, comme si elle aurait parlé d'un sujet tabou dont personne devait être au courant. Trop secouée pour parler, je fis un signe de tête négatif. Ne sachant pas trop comment avouer l'horrible vérité, j'essayai :

- Non... Ce n'est pas ça, c'est... C'est bien plus horrible que ça. Voilà... Pendant que j'étais à la Source de Lune, j'ai vu... un terrain, tout à fait normal, paisible, avec des sortes de tanières aménagées et tout... Comme un vrai Clan ! Mais la seconde d'après, c'était un décor désolant, traumatisant : du sang, la mort, des traces de griffes et de luttes partout... Et on m'a montré tous les endroits où à chaque fois ça devenait ainsi...

Je ne m'étais à ce moment pas rendu compte que je pleurait. Petite Lune, les yeux écarquillés, me consola et posa sa queue sur mon dos pour que je m'assoie :

- Hé, ça va aller... Allez, assieds-toi là, voilà... Donc, si je comprend bien, le Clan des Étoiles te demande de... Sauver cette sorte de tribu ? Et les autres guérisseurs ?

- Ils avaient l'air normaux, assurai-je.

- Attends, c'est impossible que nos ancêtres ai envoyé ce "message d'avertissement" seulement au Clan du Tonnerre. Ou que à toi, ça ne change rien au fait que ce n'est pas possible.

- C'est la première fois que je te vois aussi sérieuse, pouffai-je en me lavant les yeux avec mes pattes. Même pendant ton évaluation, tu n'étais pas aussi concentrée.

- Hé ! Ça, c'était pas une question de vie ou de mort ! s'offusqua la femelle écaille. Et ma sœur n'a pas pété les plombs ce jour-ci !

- J'ai pas pété les plombs ! miaulai-je, outrée en lui donnant une pichenette.

- Mmmh... T'es sûre de c'te info ? gloussa Petite Lune en me regardant de haut en bas d'un air théâtralement exagéré. Bref, là n'est pas la question. Bon. Imaginons que tu sois la seule, l'élue, l'unique et blablabla... Tu as un plan, au moins ?

- Heu... Ben, en fait... C'est pour ça que je suis venue te voir.

- AH. OUI, NON, MAIS LA JE PENSE QU'IL Y A UN MALENTENDU. Tu me demande ça, un truc de la plus grande importance à, à , à MOI ?? Je rêve pas, tu demande conseil à une folle ?

- Ben, comme ça on est deux, non ? marmonnai-je avec un air insistant.

- Pffffff, d'accord... J'ai compris. Bon, on pourrait... déjà, voir si d'autres personnes des autres Clans ont eu des visions semblables aux tiennes. Pendant l'Assemblée, notamment.

- C'est dans une moitié de lune ! maugréai-je. C'est trop long et tu sais que je déteste attendre. Tu le sais, hein ! Et si la tribu est déjà détruite pendant ce temps-là ! Non, on ne peut pas attendre que ça se produise.

- Et tu proposes quoi ? On ne peut pas débarquer chez le Clan du Vent, de l'Ombre, ou autre et "hop, hop, qui aurait eu une vision du Clan des Étoiles et voudrait en parler un peu avec nous ?" ! Surtout sans l'accord d’Étoile d’Écureuil !

- Étoile d’Écureuil... On pourrait lui en parler ! Elle saura sûrement quelle est la meilleure solution ! m'écriai-je.

- Mmmh, peut-être. Ou peut-être pas. J'ai une idée. Ce qu'on peut faire, c'est qu'on peut attendre de voir si tu as d'autres visions à ce sujet, tu continues de former ton apprentie, et gnagnagna... Et arrive l'Assemblée. Tu pourra demander à Étoile d’Écureuil de parler pour annoncer tes visions et il y aura probablement des personnes qui s'avanceront pour approuver ce que tu dis. Sinon, il faudra une patrouille avec des membres de plusieurs Clans...

- Comme pour les Élus du Grand Périple ! terminai-je à la place de Petite Lune. Et comme ça, les autres visions nous en apprendraient davantage sur le lieu et quand cela se produira ! Mais oui, j'aurai dû y penser avant ! La cheffe ne va pas être hyper contente de savoir ça au dernier moment, mais bon, ce n'est pas grave. Aux grand maux, les grands remèdes !

- On a une ébauche de plan... Mais il faudra toujours attendre la pleine lune... conclut la guerrière.

Je la remerciai-je, puis nos chemins se séparèrent. L'après-midi passa aussi vite qu'elle était venue, une fois que les guérisseuses mangèrent lorsque le soleil fut au zénith. La nuit bientôt arriva, Nuage de Miel et moi nous allongeâmes dans les litières de mousse que les apprentis avaient changées durant l'après-midi. L'apprentie dorée tachetée s'endormit vite, épuisée, tandis que le sommeil peinait à me gagner tant je pensais à la discussion de ce matin où j'ai avoué l'affreuse vision à Petite Lune. Mes yeux vairons, lueurs bleues et ors dans la nuit, se fermèrent doucement, sans que je me rendis vraiment compte que je m'endormais.

  1. * = temps qui passe, temps écoulé avant le nouveau texte (juste après l'*)
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